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Session du Conseil départemental du 10 octobre 2025 : le discours du président Michel Pélieu
Michel Pélieu, Président du Département, a réuni ce matin les Conseillers départementaux en Assemblée plénière. Plusieurs mesures ont été mises au vote, avec notamment une communication du rapport de la Chambre régionale des comptes Occitanie qui s’était penchée sur la gestion financière de la collectivité depuis 2022.
Avant d’aborder l’ordre du jour, Michel Pélieu a prononcé son discours d’ouverture.
CONSEIL DEPARTEMENTAL DES HAUTES-PYRENEES
SEANCE PLENIERE 10 OCTOBRE 2025
DISCOURS DU PRESIDENT, Michel PÉLIEU
Mesdames et Messieurs,
Chers collègues,
Sans m’attarder sur le contexte national qui frise l’hystérie, je voudrais simplement souligner que la crise politique actuelle et le blocage des Institutions nationales rendent plus nécessaire que jamais la relance du chantier de la décentralisation. Non pas pour rechercher auprès des collectivités locales des sources de diminution de la dépense publique, mais pour libérer leur pouvoir.
Les dépenses des collectivités locales ne représentent que 12% de la richesse du pays, ce n’est pas là que se trouve le nœud du problème de la dette publique. En revanche, c’est la preuve que contrairement à ce qu’on prétend, la France est encore très loin d’être un pays décentralisé, et c’est sans doute une des raisons de son inefficacité.
Réformer la décentralisation pourrait permettre en effet de traiter 2 des grands maux qui traversent la société française aujourd’hui. Premièrement : la polémique récurrente relative à l’inefficacité de l’action publique jugée à la fois trop coûteuse et inadaptée aux besoins des populations ; deuxièmement : la désaffection démocratique qui se traduit par l’abandon des urnes et conduit à la contestation par la rue et la défiance, parfois la violence, vis-à-vis des élus.
Mais pour que la décentralisation tienne toutes ses promesses, il faut clairement rompre avec la logique de spécialisation des compétences par échelon administratif. Une logique poussée à son comble par la loi NOTRe qui a supprimé la clause de compétence générale pour toutes les collectivités, à l’exception des communes.
Je l’avais déjà exprimé à l’époque, cette spécialisation est une grossière erreur. Elle est le fruit d’une vision simpliste et caricaturale, et n’a d’autre justification que le souhait totalement démago de donner aux contribuables, des gages simples mais totalement illusoires, de réduction de la dépense publique.
Je garde une profonde colère de ces discours simplistes, souvent le fait d’élus qui n’ont rien construit. Toutes ces théories fumeuses et déconnectées du réel finissent par venir à bout de la volonté, même la plus farouche, des élus les plus engagés, qui portent à bout de bras le développement de leur territoire et qui constatent, chaque jour un peu plus, que ceux qui devraient les aider, ne font au contraire que leur mettre des bâtons dans les roues.
La spécialisation de chacun des niveaux de collectivité locale est dévastatrice pour l’action publique locale. Elle renforce la technique au détriment du politique, entraînant de fait une déresponsabilisation, voire même une infantilisation des élus locaux, dont le rôle se limite, peu à peu, à la mise en œuvre de politiques sectorielles, limitativement définies et strictement encadrées, comme dans un banal établissement public.
La spécialisation des compétences a contribué également à fragmenter l’action publique territoriale, au risque de la rendre inefficace et finalement incompréhensible par les citoyens, à un moment où la désaffection démocratique invite au contraire à redonner du sens, au travers d’un projet global. En tant que Conseillers départementaux, nous vivons quotidiennement cette difficulté, nous sommes en permanence tiraillés entre d’un côté, notre mandat politique, issu du suffrage universel direct, qui nous incite, nous impose même, de nous occuper de notre département et de porter un projet global ; et de l’autre, des prérogatives de plus en plus limitées et cantonnées à une liste de domaines d’intervention.
Et dans ce contexte, la population ne comprend plus ce qu’elle peut attendre des collectivités locales. Le Département doit être le moteur du développement de ce territoire, mais il ne peut l’être totalement si on lui impose de s’occuper uniquement du social, des routes et des collèges.
C’est comme tenter de construire une voiture de course avec juste deux pneus et une pédale.
Ce n’est pas possible. C’est pareil pour nous.
Mais si ce n’est pas le Département qui porte un projet de développement pour le territoire, qui va le faire ? La Région, qui va des Pyrénées au massif central en passant par le littoral ? Les Communes, dont la moitié ont moins de 200 habitants ? Les intercommunalités, fragilisées par des rapprochements imposés ? La spécialisation des compétences est un fardeau pour les territoires comme le nôtre.
Elle repose sur une vision très administrative des choses qui consiste à vouloir faire rentrer chacun dans des cases, mais c’est une vision qui va à rebours des évolutions de la société.
Dans une société marquée de plus en plus par les mobilités, par les nécessités de fluidifier, décloisonner, échanger, mutualiser, il est archaïque et aberrant de penser l’organisation institutionnelle territoriale de la France sur le modèle du chacun chez soi, avec des niveaux de collectivités locales enfermés dans leurs domaines de compétences respectifs. Je crois pour ma part qu’il faut acter qu’il n’y a pas de périmètre magique adapté à la résolution des problèmes, quels qu’ils soient.
Il y a, en revanche, dans notre société marquée par le poids des mobilités et des réseaux, la nécessité de développer, plus que jamais, les coopérations entre les territoires et les stratégies territoriales concertées à l’échelle locale. L’organisation institutionnelle territoriale de la France ne peut plus être pensée comme un système vertical et cloisonné, mais au contraire comme un système ouvert, fondé sur le partenariat et les coopérations, portés par des contrats librement discutés et consentis.
Mais pour permettre ces coopérations efficaces, il faut redonner aux collectivités locales un vrai pouvoir politique, c’est-à-dire, leur rendre une capacité effective d’agir globalement sur l’ensemble des défis sociaux, économiques, environnementaux auxquels elles sont confrontées.
Concrètement, cela signifie qu’il faut rendre aux collectivités locales la clause de compétence générale, et y adjoindre la responsabilité fiscale. C’est à ce prix qu’on améliorera la lisibilité, l’efficacité et l’appropriation politique de l’action publique.
C’est en tout cas ma conception de la décentralisation, que je souhaitais partager avec vous, faute d’avoir pu le faire avec notre éphémère 1er Ministre Lecornu. Mais je ne doute pas que ce sujet reviendra très vite sur le devant de la table, et il est important d’avoir les idées claires, même si, une fois n’est pas coutume, elles ne sont pas l’expression d’un discours dominant.
Sur ces mots, je vous propose de passer à l’examen des dossiers et je vous remercie pour votre attention.
Michel PÉLIEU,
Président du Département des Hautes-Pyrénées
rédaction
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