Journal d'informations en ligne

 

 


Chaque semaine, la rédaction procèdera à l'interview d'une personnalité départementale, régionale, et ce dans les divers secteurs de l'actualité.

 

Jean-Pierre ARTIGANAVE, le maire de Lourdes, est l'invité de la semaine.

Les thèmes abordés
- Priorité sur le centre-ville
- Coût de l'opération des halles
- Rupture avec le RPF ?
- Relations avec les élus de gauche
- Le passsage de l'UDF à l'UMP
- Cohabitation avec les ex-RPR
- Régionales 2004
- Perspectives de la saison
Lourdes-infos.com : Jean-Pierre Artiganave, voici deux ans, vous étiez élu maire de Lourdes. Etes-vous satisfait de l’action conduite jusqu’à présent ? Quelles sont les points positifs selon vous les plus importants ? Par contre, avez-vous regretté de ne pas avoir mené encore à bien certains projets ?
Jean-Pierre Artiganave : "Faire un bilan après deux ans, c'est un peu compliqué.On a lancé pas mal d'opérations. Par rapport à ce que nous avions dit durant la campagne, l'important - selon nous - c'est d'agir avec une priorité sur le centre-ville (Halles, place du Champ-Commun, rue Lafitte, place Marcadal, place Peyramale).Il faut retrouver un cadre, pas simplement pour une question esthétique, mais aussi pour des questions d'achalandise, afin de donner aux habitants de Lourdes, aux commerçants de meilleures conditions de vie. Le projet du mandat, c'est la réhabilitation, la reconstruction de la halle alimentaire, de la place du Champ-Commun parce que l'on pense que - étant le coeur central de la ville - en retrouvant un cadre d'animation avec des halles refaites, des halles aux normes, esthétiquement à la hauteur de ce qu'est ce Baltard, Lourdes retrouvera un coup de jeune. C'est une opération lourde, qui demande du temps. Nous avons travaillé ce dossier pendant quasiment deux ans. Il va falloir accoucher de ce projet. Pour nous c'est le projet majeur de ce mandat.
Ce que je regrette, c'est le temps qu'il faut passer pour arriver à sortir les projets des cartons. On est à une époque d'attente, mais aussi de craintes vis-à-vis de l'avenir. On dit beaucoup de choses sur Lourdes. Il faut remonter sur tous les paramètres. Le premier, c'est celui de la confiance dans l'avenir.La confiance se gagne sur des résultats. Quand on parle d'économie ou de développement économique, on touche le point. En politique, on ne fait pas toujours que
des satisfaits mais la politique c'est sans doute plus un art qu'une science. Je ne sais pas si je suis parfait là-dedans. Aujourd'hui, l'art c'est savoir se concerter, savoir prendre une décision qui vise à l'intérêt général. La difficulté, c'est le temps qui passe entre la décision de faire quelque chose et l'application et le résultat de cette décision".
Restauration des halles : 45 millions de francs
S'agissant de la restauration des halles, d'aucuns estiment que l'opération sera coûteuse pour les contribuables. Avez-vous l'assurance d'obtenir les subventions que vous annoncez ?
Jean-Pierre Artiganave : "Je ne suis pas inquiet sur les subventions à obtenir, à la fois sur les halles alimentaires qui ne dépasseront jamais 50% du coût, j'en suis convaincu. Je suis encore plus convaincu du niveau de subventions que nous pourrons atteindre sur la médiathèque. La médiathèque rentre dans le droit fil d'une politique culturelle décentralisée. C'est ce que veut le ministre de la Culture, c'est aussi ce qu'il transfère auprès de l'autorité régionale. Donc parler avec prudence d'un niveau de subventions de 70% sur la médiathèque, ça ne me semble pas inconvenant. Avec les halles, nous faisons un pari. Nous, ce sont les Lourdais. On voulait que cette opération importante soit possible sans perturber la politique de désendettement que nous avons mis en place depuis 1995; ensuite sans alourdir la fiscalité en respectant le pacte fiscal et rendre cette opération possible politiquement, c'est-à-dire avec un niveau d'acceptation et de consensus des commerçants des halles, des riverains de la place du Champ-Commun et plus globalement des Lourdaises et des Lourdais. C'est un défi. Quand je dis les Lourdaises et les Lourdais, on fait collectivement un pari, c'est moins un défi financier ou fiscal qui nous attend, qu'un défi politique, c'est-à-dire retrouver un centre-ville qui se tienne, où il fait bon vivre, où les commerçants retrouvent de la chalandise, où il y a des bâtiments rénovés, où il y a des façades commerciales réhabilitées. Nous devons avoir des commerces qui marchent mieux parce qu'ils se trouvent dans un cadre rénové, réhabilité où la chalandise est meilleure.
Le coût global du projet se situe autour de 45 millions de francs. Sur trois exercices, c'est un coût net pour la commune de l'ordre de 12 à 15 millions de francs".
 
On a parfois l’impression que l’équipe majoritaire que vous conduisez se plaint de ne pas être assez souvent associée à la marche des affaires. Certains vous reprochent de ne vous appuyer que sur trois ou quatre personnes ? Quelle est votre réponse à ce sujet ?
Jean-Pierre Artiganave :"Il en a été toujours ainsi. C'est vrai, je le reconnais, un maire, un conseiller général, un conseiller régional, doivent s'appuyer sur des compétences qui ne sont pas super étendues. Quoi qu'il arrive, je me soumets à la décision souveraine du conseil municipal. Vous avez vu que parfois ça ne manque pas de poser un certain nombre de problèmes. Sur l'information, chaque municipalité a eu des élus plus présents que d'autres. Quelles que soient les municipalités, j'ai toujours entendu des conseillers municipaux se plaindre à la fois d'un manque d'informations mais parfois aussi de ne pas être présents lorsque l'information est diffusée. On ne fait jamais le bonheur de tous. Même dans un conseil municipal. Certains ont parfois la chance de trouver le bonheur dans le conseil municipal. Je n'ai jamais raison sur tout contrairement à une espèce d'image qui est véhiculée. On ne peut pas travailler seul aujourd'hui dans le monde tel qu'il est et dans Lourdes tel qu'il est".
La grogne du RPF
Puisque l’on évoque votre équipe municipale, c’est de notoriété publique qu’une scission s’est fait jour avec le RPF et votre adjointe Ginette Héry. Ainsi, a-t-on pu remarquer l’absence de cette frange majoritaire lors du vote du budget. Ça ne doit pas vous faire plaisir tout ça car la quasi-rupture apporte de l’eau au moulin de votre opposition …
Jean-Pierre Artiganave : "Je ne sais pas s'il y a rupture. S'il y a rupture, c'est clair que lorsqu'on ne vote pas un budget municipal, ça pose quelques problèmes. Ça veut dire qu'on met le maire dans une situation pas forcément agréable. Le dossier qui a focalisé cette opposition, est le projet de la médiathèque. Il y a eu un débat municipal, un débat en commission, un débat en majorité plénière. Chacun prend ses responsabilités. Je ne serai pas le fauteur de rupture sur un dossier particulier. La vie est longue, elle dure six ans. On vit dans une situation parfois un peu précaire. Moi, la précarité je la vis depuis longtemps. Je vais voir jusqu'à quand je pourrai l'assumer. L'opposition est dans son rôle. On peut avoir des débats même pas houleux, un peu épidermiques. Il ne me semble pas que l'opposition dite municipale soit non plus tout à fait cohérente de ce qu'on regarde depuis un certain nombre de mois. Quand je dis cohérence, ce n'est pas par rapport à des compétences intellectuelles, je dirai par rapport à des situations politiques".
 
N'avez-vous pas pensé un moment retirer sa délégation à Madame Héry ?
Jean-Pierre Artiganave : " D'abord retirer une délégation, c'est compliqué. C'est compliqué sur un plan juridique parce qu'il faut vraiment une opposition qui mette le maire sur des éléments objectifs en mesure de pouvoir retirer, ce qui est un acte important. Je vais pas à pas dans cette affaire. Et puis je regarderai les éléments qui font qu'en effet il y ait une rupture sur le plan organique. Pour le moment et objectivement, hors les considérations personnelles, il y a d'autres choses derrière".
Relations avec les élus de gauche
 
En tant que maire de Lourdes, classé dans le camp de la majorité présidentielle , quelles sont les relations entretenues avec les élus de gauche du département ? Chantal Robin-Rodrigo, la députée, aimerait être davantage associée à la vie municipale.

Jean-Pierre Artiganave : "Sur le plan des relations, je m'efforce d'être un homme à l'écoute et d'être un homme conscient aussi de la responsabilité des autres. Ça vaut pour tous les élus de ce département. Après, il y a le combat politique. C'est un temps d'élection. Après, il faut prendre acte des positions des uns et des autres. On dit cordialité, oui. Je ne suis pas quelqu'un qui va montrer des signes d'énervement par rapport à des élections perdues ou gagnées. Si on veut retrouver une forme de dignité de la politique, c'est une attitude qui peut aider.
Chantal Robin-Rodrigo est invitée à chacune des manifestations où elle souhaite venir. Que ce soit du fait de la municipalité, de personnes privées ou d'associations. C'était le cas à l'Astazou, l'autre jour. Ce n'est pas de mon fait si Chantal Robin-Rodrigo, invitée par le président de l'association familiale de l'Astazou, n'est pas venue à ce rendez-vous où j'étais. Elle n'a à attendre aucun ostracisme de notre part, tant sur des manifestations que sur un certain nombre de réunions. Chacun a aussi sa limite de circonférence et sa limite politique. Je suis maire de Lourdes, je n'ai pas forcément tous les matins à prendre le pouls de la députée sur l'ensemble des problèmes qui se posent tous les jours - quand je me lève - sur la ville de Lourdes. Le contraire est aussi vrai. Il y a des sujets, des dossiers, des moments où l'on se retrouve (La RN 21, l'aéroport, le contrats de pays ...). Chantal Robin-Rodrigo est députée de la 2e circonscription des Hautes-Pyrénées, il est évident que ce n'est pas quelqu'un que l'on contourne sur un certain nombre de choses. C'est aussi une règle républicaine. J'entends l'appliquer comme j'entends aussi qu'on m'applique sur d'autres sujets ce même type de règle républicaine. Je n'ai pas trop à me plaindre là-dessus".

 
Le passage de l'UDF à l'UMP
 
Sur le plan politique, vous avez quitté François Bayrou pour rejoindre l’UMP et Alain Juppé. D’aucuns vous l’ont reproché dans le camp centriste. Est-ce que les choses se sont améliorées et avez-vous pu faire admettre facilement ce franchissement du rubicon ?
Jean-Pierre Artiganave : "Pourquoi suis-je allé à l'UMP ? Je vais essayer de le redire. Avec François Bayrou, je suis allé au bout de ma parole et de mon engagement (J'ai voté pour lui aux élections présidentielles). Je lui ai donné mon soutien en tant qu'élu. Une fois les élections présidentielles passées, chacun a fait une analyse. Personnellement, j'ai fait l'analyse de l'union. Chacun, dans son histoire politique personnelle, a payé un tribut à la désunion. Je ne veux plus revivre ça. La France a besoin d'un bipartisme clair, afin de ne pas retomber en particulier vis-à-vis du Front National dans les errements qu'on a pu connaître. Ensuite, par rapport à ce qui a pu se passer politiquement ces dernières années, j'ai voulu faire moi aussi un pas et dire "aujourd'hui il faut que nous retrouvions, en particulier dans les Hautes-Pyrénées, derrière une même bannière parce que ça doit nous permettre de garder à la fois nos positions et d'en regagner d'autres. Politiquement, il est plus sain de faire ainsi et arrêter parfois une stratégie de mort électorale que nous avons subie les uns et les autres depuis trop longtemps, particulièrement dans les Hautes-Pyrénées. Quand j'ai quitté l'UDF, je l'ai fait dans les formes.Je me suis adressé à mon président départemental pour lui dire mon analyse. Je l'ai fait par écrit une fois le congrès fondateur de l'UMP passé. (...) Concernant l'arrondissement de la 2e circonscription, il y a l'UMP et l'UDF. Ces deux formations travailleront en bonne entente. Les échéances doivent être préparées ensemble.Et le plus rapidement possible.
 
Aucun ostracisme contre le RPR
Vous êtes le patron départemental de l’UMP et vous vous retrouvez aux côtés des anciens du RPR qui vous ont durement combattu au moment des municipales 2001, de même qu’à Tarbes avec Gérard Trémège, cela ne doit pas être joyeux lorsque vous vous réunissez. On peut penser que la soupe à la grimace est souvent au menu des vos cogitations ?
Jean-Pierre Artiganave : "Non. D'abord, je ne suis pas le patron de l'UMP. Je serai peut-être le secrétaire départemental. Depuis hier soir, il y a un patron départemental : c'est le président du comité départemental de l'UMP, Gérard Trémège. Je suis un ouvrier de l'union. J'essayerai de faire mon boulot de secrétaire départemental du mieux possible pour arrondir les angles et faire en sorte que les choses, dans l'entente et dans l'union, se passent bien. C'est bien de me donner l'occasion de le dire : je n'ai jamais eu aucune forme d'ostracisme, de combat contre le RPR. Depuis 30 ans, le RPR pour moi est incarné par José Marthe. Rappelons deux choses : ma première expérience politique, je l'ai eue auprès de José Marthe. J'ai toujours respecté José Marthe, c'est un homme pour lequel j'ai beaucoup de considération; on a parfois des analyses sociétales, politiques qui peuvent être différentes, ça n'empêche que ce qui doit prévaloir c'est d'abord le respect. Et moi, je respecte José Marthe. Après, il y a eu un épisode à Lourdes avec les élections municipales de 2001 qui a laissé des traces. Je n'ai jamais mené un combat personnel contre José Marthe. J'ai mené une campagne digne, sans aucune attaque personnelle, ni vis-à-vis de lui ni vis-à-vis du RPR en général. C'est une des raisons qui m'ont amené - ce n'est pas une raison tactique - de faire la démarche vis-à-vis de l'UMP. Moi, je ne revendique pas une place éminente au sein de l'UMP. Il se trouve qu'Alain Juppé a choisi Jean-Pierre Artiganave comme délégué départemental provisoire de l'UMP. Cela n'est pas outrageant pour les uns et pour les autres, et certainement pas pour José Marthe".
 
"José Marthe est incontournable"
Les premières échéances électorales s’annoncent l’an prochain avec les régionales sur lesquelles vous aurez évidemment votre mot à dire, d’autant que votre prédécesseur et ami, le maire de Toulouse Philippe Douste-Blazy, surveillera cela de très près. Serez-vous candidat dans l’équipe conduite à priori par Jacques Godfrain, le députe-maire de Millau ? Quid des sortants et notamment de José Marthe, Jean-François Calvo qui n’ont jamais été vos supporters …Les municipales n’auront-elles pas laisser des cicatrices profondes ?
Jean-Pierre Artiganave : "Pour moi et pour José Marthe, les municipales sont loin derrière. On a renoué un contact tout à fait amical, au-delà parfois d'un certain nombre de désagréments. Récemment, les élections à l'UMP l'ont montré. Ici à Lourdes, nous avons parfaitement joué le jeu. Il va y avoir des régionales. Il semble que Jacques Godfrain soit désigné pour tête de liste à ces élections. Je trouve que c'est une bonne chose. Jacques Godfrain est un homme d'expérience. C'est un homme de valeur, qui connaît bien Midi-Pyrénées.Je sais qu'il aura un projet pour Midi-Pyrénées. Si à un moment ou à un autre, Jacques Godfrain souhaite que le maire de Lourdes soit à ses côtés, je lui répondrai oui car mener ce combat ensemble m'intéresse.Vis à vis de José Marthe, que les choses soient très claires. José Marthe a été vice-président du conseil régional, il est sortant. Pour Jean-Pierre Artiganave, José Marthe est incontournable dans cette dynamique dont j'espère qu'elle sera une dynamique de succès. Je lui ai déjà dit. Nous devrons aborder cette élection dans la meilleure union possible. Toute union implique des sacrifices. Je serai à la place qu'on me désignera si on souhaite me désigner à une place".
 
Pour terminer, revenons sur le plan local, la saison lourdaise s’approche. Selon les renseignements en votre possession, comment s'annonce-t-elle ?
Jean-Pierre Artiganave : "Chaque année, plane toujours une forme d'incertitude sur la saison touristique lourdaise. Cette année peut-être encore davantage par rapport aux évènements que l'on connaît et qui auront des répercussions importantes sur le plan de l'économie mondiale. D'après les informations qui sont à notre disposition aujourd'hui, il faut s'attendre à une saison qui ne sera pas catastrophique mais qui ne sera pas forcément une très bonne saison non plus, vis-à-vis d'informations que nous avons en termes de réservations, de fréquentation générale. Nous rentrons dans un monde d'incertitudes. Cette guerre pèsera sur l'état du monde, sur l'économie touristique du monde. On va voir rapidement les répercussions du conflit en Irak. Peut-être moins dans l'avant-saison. Le pèlerinage militaire est maintenu. Sur les premiers gros pèlerinages de début de saison, .il n'y a pas d'inquiétude. Ce qui inquiète les Lourdaises et les Lourdais, c'est que les choses ont changé. L'économie touristique lourdaise est bouleversée, de même que l'économie hôtelière lourdaise. Nous sommes, dans l'histoire de Lourdes, à un moment de bascule. C'est à ce moment-là qu'il faut poser l'armature et l'architecture économique de cette ville pour l'avenir, pour lui permettre d'affronter des années incertaines sur le plan mondial comme elle a pu le faire dans le passé".

Propos recueillis par Gérard MERRIOT