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LOURDES*
SON PAYSAGE ? SON PASSÉ

Qu’il est difficile d'évoquer LOURDES !

Comment décrire ses rues montantes et capricieuses, ses toits bleuâtres, en bonne ardoise de Bigorre, le fond bleu de son ciel d'été, ou bien "la tristesse de ce ciel rayé en diagonale par le fil des pluies... la vieille ville, que domine un antique donjon qui parait fabriqué pour un décor d'opéra, avec des châssis de toiles peintes" ?

Mais qu'il est doux parler de cette Cité, de humer cet air chargé du parfum des proches montagnes, et de se laisser prendre à cette atmosphère de mélancolie, de douceurs de recueillement, que nous apporte le bruit familier des cloches de Massabielle.

L'histoire religieuse de LOURDES est l'héritage du Monde. Aussi, avant de l'évoquer très simplement cette histoire, désirerai-je décrire le cadre de la Cité dont je veux aussi faire revivre le passé.

Situation

Donc, au Sud-Ouest du département des Hautes-Pyrénées, blottie dans un bassin de verdure, appuyée sur les premiers contreforts pyrénéens, se situe Lourdes.

C'est actuellement une agglomération de 15 829** habitants dont le territoire s'étend sur une superficie de 3864 ha 76 a 38 ca avec 101 kms***, 745 voies urbaines, vicinales et rurales. D'une altitude de 420 mètres, LOURDES le noyau central d' où partent, comme des rayons, les vallées de Batsurguère, de Castelloubon et d’Argelès, cherchant à atteindre la montagne et les vallées de Lézignan, d'Arcizac, de Pau et de Tarbes, qui s'étirent vers la plaine.

Comment ne pas admirer ce tableau, sur le fond s'estompent vers le Sud, les crêtes blanches des pics pyrénéens, Pibeste, Pic d'Aulian, Vignemale, et, tout près pour finir de briser les vents venant d'Espagne, le Béout, le Petit Jer, le Grand Jer et son immense croix qui veille sur la Ville, sommets atteignant 800 et 1000 mètres. Vers le Nord, un chapelet de verdoyantes collines, d'une altitude de 400 et 500 mètres, puis, comme s'il fallait encore à ce paysage la marque du génie, le Gave, à demi dompté, venant de Gavarnie, grossi par les torrents de Barèges et de Cauterets, traverse, avec orgueil, l' agglomération lourdaise en direction Sud-Nord, pour, capricieusement, s’échapper ensuite vers l'Ouest, afin d'honorer de ses faveurs la plaine du Béarn, avant de se donner à la Cité d'Henri IV et de prendre le nom de Gave de Pau.

retour haut de pageL'antique forteresse

Enfin, dressé fièrement au milieu de la Cité, largement reposé sur son escarpement de granit, le Château-Fort. Au cours des ans, l'antique forteresse a continué sa veille. Admirez-la.

Solide portier des sept vallées lavedanaises, elle est faite de ciment romain. Elle a vaillamment combattu : ses gargouilles qui ont jadis ricané de verser la poix fondue et l'huile bouillante, ne laissent couler, aujourd'hui, que leur pluie, au milieu du lierre et de la mousse. Ce n'est plus le temps de la guerre.

Mais avant d'ouïr l'histoire de cette citadelle, qui est, en même temps celle de la Ville qu'elle protège, n'est-on pas en droit de se demander pourquoi, ce coin de Bigorre fut choisi par les hommes des premiers âges, pour y habiter ? Est-ce pour la beauté du paysage, la douceur du climat, ni continental, ni maritime ? Il est bien difficile de le dire. Une chose est certaine dans les grottes des "Espélugues", sur le territoire de LOURDES furent trouvés des haches en silex, des pierres taillées, des ossements, apportant la preuve du passage des hommes des cavernes et de leur séjour prolongé en cet endroit. Ces découvertes se trouvent au Musée de Saint-Germain-en-Laye ou au Musée Pyrénéen du Château-Fort de LOURDES.

La légende

Les siècles, en passant, cisèlent des légendes qui sont les Muses de l'Histoire.

Ainsi les ans purent-ils façonner la naissance de LOURDES.

En des temps très anciens, il y avait, en Ethiopie, une reine nommée TARBIS. Quoique reine, elle était bien malheureuse, car l'amour avait touché son cœur, et celui qu'elle aimait n'éprouvait pas, pour elle, le même sentiment. Alors, par dépit, elle quitta son pays, amenant sa sœur LORDA. TARBIS vint s'établir sur les bords de l'Adour pour fonder la Ville de TARBES, et sa sœur, sur les bords du Gave, fit surgir LOURDES !
Puis vinrent les Gaulois, les Romains, qui fortifièrent le rocher de LOURDES, les Barbares, les Maures. Ceux-ci, vaincus en 732 à Poitiers par Charles MARTEL, battirent en retraite vers l'Espagne, se firent à nouveau décimer dans la plaine de TARBES, au lieu appelé Lande Maurine, et s'enfermèrent au Château de LOURDES.
Et maintenant, écoutez cette légende, transmise en pays de Bigorre avec tout l'héritage des coutumes et des traditions.
En cette année 778, Charlemagne, à 1a tête de son armée, s'en va guerroyer en Espagne. Le gonfanon d'azur brille au ciel de Bigorre, et les neiges éternelles éclatent sur les armures des fiers barons, serrés près du grand Empereur. Depuis de nombreux jours, le bruit de l'olifant réveille les montagnes ; mais aussi, depuis de nombreux jours, le Sarrazin MIRAT et ses Maures, enfermés dans ce Château de LOURDES, résistent à Charlemagne et à ses Chevaliers. Malgré les assauts des Francs, malgré la famine, la peste ou le scorbut, l'étendard au croissant flotte sur Mirambel. Et voilà que de l'azur, en un vol à la fois puissant et majestueux, surgit un aigle. Il survole le Fort, laisse tomber aux pieds du Chef des Maures l'énorme truite qu'il tient dans son bec. MIRAT prend le poisson, le contemple un moment, puis, par dessus les remparts, le jette aux soldats de Charlemagne.

Pensant que l'Infidèle possède encore des vivres en abondance, l'Empereur fait plier les tentes aussitôt. C'est alors que TURPIN, Évêque du PUY, compagnon de Charlemagne, obtient l'autorisation d'aller parlementer avec l'assiégé. L'homme de Dieu, apportant le pardon de Charlemagne, convainc MIRAT de le suivre pour remettre à Notre-Dame du Puy sa reddition. Le jour de son baptême, MIRAT prend le nom de LORUS qui, transmis à la ville, deviendra plus tard LOURDES. Et le blason lourdais porte depuis ce temps "deux gueules à trois tours d'or, maçonnées de sable, sur "un roc d'argent ; celle du milieu plus hautes surmontée d'un "aigle de sable éployé, tenant au bec une truite d'argent".

Ainsi nous ont parlé nos pères, en nous contant, les soirs d'hiver cette vieille légende de chez nous.

retour haut de pageDu IXe siècle à nos jours

Mais en vérité, LOURDES devait acquérir d'autres mérites a sa future destinée.

Au IXe siècle, la Ville fit connaissance avec les Normands; au XIVe siècle, le donjon qui, depuis le 8 Mai 1360 en vertu du traité de Brétigny, était devenu possession anglaise, résista au duc d'Anjou, mais la Ville fut pillée et brûlée; au XVe siècle, le Comte de Clermont et le duc de Berry échouèrent également devant la forteresse. Survinrent les guerres de religion : le 8 Juin 1573, LOURDES fut saccagé par les troupes huguenotes du baron d'ARROS, lieutenant de Jeanne de Navarre.

Au XVIIe , l'histoire militaire du Château-Fort de LOURDES est terminée. Le rattachement de la Bigorre à la France, en 1607 ainsi que les progrès réalisés dans l'emploi des armes, diminuent l'importance de la citadelle. Elle conserve une petite garnison et devient prison d'État. Les lettres de cachets lui fournissent une clientèle aussi choisie que variée : consuls, prêtres; nobles huguenots. Plus tard, l'Empereur Napoléon Ier y offrit même une villégiature forcée à l'ambassadeur anglais Lord Eldgin.

Ainsi, traversant sans trop de dommages la période troublée qui suivit 1789, saluant avec une joie égale l'Empire et le retour des rois, LOURDES devenait une agréable petite ville ayant ses notables : médecins, pharmaciens, avocats, notaires et même magistrats, car le Tribunal de première instance, qui se trouvait précédemment à ARGELES-GAZOST, sous-préfecture du Département, fut transféré à LOURDES par une loi du 20 Nivôse an 13. Et le 6 Février 1836, son premier Commissaire de Police fut chargé de veiller à la sécurité de ses habitants.

En 1843, la population lourdaise s'élevait à 4 148 habitants. La Ville se transformait; une nouvelle chaussée prolongeant la route venant de TARBES, traversait LOURDES, en direction d'ARGELES-GAZOST. Elle portait le nom de Chaussée Maransin, en souvenir de Jean-Pierre Maransin, Général des armées de la République et de l'Empire né à LOURDES le 20 Mars 1770, décédé à Paris le 15 Mai 1828. Son nom a été gravé sur l'Arc de Triomphe de l'Etoile, côté ouest.

L'année suivante, le 7 Janvier 1844, une petite lourdaise indistincte dormait pour la première fois bercée par la chanson du Moulin de Boly : Bernarde-Marie SOUBIROUS, fille de François SOUBIROUS et de Louise CASTEROT.

retour haut de page11 février 1858 : Première apparition

Au moment où cette naissance allait bouleverser son destin, à l'ombre du Château-Fort symbole de son passé, LOURDES donnait asile à 4 155 habitants, et possédait 459 maisons. Mille deux cents ouvriers travaillaient dans ses carrières de marbre et d'ardoises, ses marchés et ses foires étaient de grande importance.

Charmée par le chant de ce Gave qui serpente sous le Pont-Vieux, serrée entre sa vieille Eglise et son vieux Château-Fort, gardiens du Souvenir et de la Tradition, LOURDES, modeste Cité d'une vallée pyrénéenne, se prépare à vivre cette journée du 11 Février 1858, jour de la première apparition de la Vierge à Bernadette SOUBIROUS. Jusqu'alors "c'était une ville plus traversée que connue". Elle va devenir un pôle d'attraction spirituel d'une intensité telle que sa structure physique s'en trouvera modifiée, en faisant surgir une cité nouvelle faite d'hôtels et de magasins, de couvents et de chapelles, lui imposant des obligations à la mesure de sa destinée.

Pour LOURDES en LAVEDAN, a sonné l'heure de l'Espérance.

 

Pierre Lafourcade

*Nous tenons à remercier pour son autorisation à publication la famille de Pierre Lafourcade, le regretté archiviste bibliothécaire de la ville de Lourdes, auteur de cette remarquable présentation, écrite en 1957 et qui reste d'actualité

 

** 15 679 habitants au dernier recensement

*** 3694 hectares aujourd'hui.

 

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