AEROPORT. --Après le jugement de Strasbourg, la Chambre de commerce béarnaise a-t-elle du souci à se faire ? Michel Brau, son président, ne le croit pas

« Ryanair ne concurrence personne dans la région »

:Yannick Delneste



 

Le 24 juillet dernier, le tribunal administratif de Strasbourg annulait deux délibérations de la Chambre de commerce du Bas-Rhin (notre édition du 25 juillet). Ces dernières établissaient avec la compagnie aérienne Ryanair une première convention sur les modalités d'utilisation de l'aéroport d'une part, une seconde sur un plan marketing au profit de la région Alsace et de Strasbourg. Le tribunal donnait donc raison à la compagnie plaignante Brit Air, exploitant déjà une liaison Strasbourg-Londres, et dénonçant, via ses aides, une distorsion de concurrence.
Ryanair a ouvert une ligne Pau-Londres depuis le 30 avril dernier, et a entrepris d'obtenir de la chambre de commerce le même type de « soutien ». Basée à l'aéroport de Tarbes, la compagnie Air Méditerranée qui exploite, entre autres, des vols charters vers Londres, dénonce depuis plusieurs mois la situation paloise. Michel Brau, le président de la Chambre de commerce et d'industrie de Pau-Béarn, refuse l'amalgame.
Sud-Ouest
Comment interprétez-vous le jugement récent du tribunal de Strasbourg ?
Michel Brau :
La compagnie Brit Air exploite une liaison entre Strasbourg et Londres depuis longtemps. Ryanair s'installe sur la même ligne et il y alors matière à se poser des questions. A Pau, la ligne avec Londres est une nouveauté totale. Elle ne concurrence donc personne ici. A Tarbes, Air Méditerranée fait des vols charters de temps en temps, pour Londres mais aussi Dublin. Ryanair assure 364 rotations par an ! (1)

Vous avez convenu néanmoins, comme à Strasbourg, d'un plan marketing que vous assumeriez financièrement, mais assuré par Ryanair. Ne craignez-vous pas un même désaveu juridique ?
Quand Air France a développé ses lignes au départ de Pau, nous avons également aidé à faire connaître ses vols quotidiens. Certes, avec Ryanair, nous n'avons pas le contrôle absolu des opérations marketing. L'aéroport de Tarbes a en son temps, participé activement à la publicité d'Air Lib, jusque chez nous, et nous n'avons jamais rien trouvé à redire : c'est la loi du commerce. On sait ce qu'il en est advenu : cette compagnie a laissé un « trou » en Bigorre de 207 000 euros !
L'aéroport de Tarbes et de sa Chambre de commerce ont été très longtemps en concurrence avec nous sur le dossier Ryanair : ils se seraient très bien accommodés de leurs conditions si la compagnie les avait choisis ! Pour jouer les vierges outragées, il faut être vierge.

Où en est-on du contrat entre la CCI de Pau et Ryanair ?
Il y a un accord de parole conclu à la fin du mois de janvier. Ryanair nous promet d'amener 50 000 passagers par an et nous nous engageons de contribuer au plan marketing jusqu'à un plafond de de 400 000 euros si cet objectif est atteint. A ce sujet, nous recevons de Ryanair, chaque mois, une facture. A la fin de la première année d'exercice, nous verrons si Ryanair atteint ses prévisions, et le versement sera ajusté en fonction. Nous avons également versé 80 000 euros pour le lancement de la ligne.

Avez-vous sollicité les collectivités locales pour abonder ces aides au plan marketing ?
C'est pour le statu quo. Nous attendons de savoir comment vont évoluer les choses. En tout cas, les membres du syndicat mixte de l'aéroport sont décidés à nous aider : j'ai le soutien sans faille des élus locaux.

Quel bilan tirez-vous des trois premiers mois de Ryanair à Pau ?
A titre d'exemple, j'ai là les résultats de la semaine dernière, du 21 au 27 juillet : une moyenne de remplissage de 83 %. 95 % le dimanche, 95 % le samedi, 92 % le mardi, etc. Nous constatons partout les signes d'une clientèle nouvelle anglaise qui développe l'économie locale. Le restaurant de l'aéroport a vu son chiffre d'affaires croître de 20 %, et il a embauché deux personnes. C'est un des nombreux indices d'une grande réussite.