A l’ami François Mengelatte

 

 Tu aimais la vie François. Mais qui ne l’aime, à moins d’être dans une détresse extrême ? Tu aimais les gens, ce qui est déjà moins commun. Nos contemporains font souvent triste figure et passent une grande partie de leur temps à se plaindre ou à fuir leurs semblables. Aussi ton visage toujours rayonnant était-il une sorte de soleil qui mettait de bonne humeur ceux qui t’approchaient ou croisaient ton chemin. Tu étais un homme chaleureux. On se sentait meilleur, plus tonique après t’avoir rencontré.
  

Mieux, tu étais plein de l’amour des autres. Jour après jour tu  allais à leur rencontre ou répondais à leurs sollicitations. Comme artiste, tu t’efforçais d’apprivoiser la beauté en saisissant un visage ou un paysage. Ce faisant, tu affichais ta générosité : peindre, c’est donner à voir un reflet du monde. Le tien était particulièrement coloré, festif et humoristique. Il l’a toujours été, mais de façon de plus en plus accentuée avec les années, comme un pied de nez à la mort, à la maladie, à la souffrance. Le cadeau était permanent, et, grâce à tes tableaux, il demeure quotidien. Qui regarde une de tes toiles se souvient aussitôt de toi, de ta bonhomie, de ta gentillesse, de ton dynamisme, de tes pitreries… Tu avais une affection particulière pour les clowns, dont la pudeur et l’élégance consistent à voiler leur tristesse sous des masques et maquillages. Plus qu’un autre, l’artiste sait le prix de la vie et que cette dernière nous est parcimonieusement comptée.

Mais ta générosité ne se manifestait pas seulement par la vertu de tes pinceaux. Elle était citoyenne, bénévole, au service des autres. Tes engagements ont été nombreux. Tu as consacré beaucoup de temps aux causes humanitaires, philanthropiques, culturelles. Pour ma part, quand je songe à toi, je vois se dérouler quarante années de vie. Tu étais là quand, avec quelques amis, j’ai fondé l’association des Jeunes Lourdais, puis le Grenier des arts et des loisirs, le prix Prométhée, l’Atelier Imaginaire. Nous avons accueilli ensemble Max-Pol Fouchet et Paul Guth à Lourdes mais aussi Jean Carzou, Mady de la Giraudière, Toffoli, Michel Plasson…  Bien des photographies sont là pour en témoigner. En 2006, tu as accepté que ton tableau Fête au village illustre le livre d’Abdelkader Djemaï Pain, Adour et fantaisie. J’ai toujours su que je pouvais compter sur toi si la nécessité s’en faisait sentir. C’est dire combien ta disparition m’affecte. Tu t’en es allé en emportant bien des souvenirs mais aussi et surtout ce sentiment confortable de savoir que je pourrais recourir à tes bons conseils en cas de besoin. En prenant conscience de ce vide, je devine l’immensité de celui qu’éprouvent ton épouse, tes enfants et petits-enfants que j’embrasse bien fort en les remerciant d’avoir accepté de te partager avec tes nombreux amis.  

 

Guy Rouquet

Mis en ligne mardi 25 août 2009