Le 17ème Derby 3000 Gavarnie-Gèdre :
Fabuleux !
Le
haut niveau du ski alpinisme
« Infiniment Pyrénées » nous
dit la station de ski Gavarnie-Gèdre. C’est bien ce qui colle à cette
compétition de ski alpinisme organisée par
le club
Amitié et Nature
Tarbes (ANT)
affilié à la Fédération
Française de la Montagne et de l’Escalade et homologuée
par l’ISMF, la Fédération internationale de ski alpinisme.
Créée en 1992 par Guy Cattai, alors
directeur de la station, elle a été reprise sous la
coupe ANT
/ FFME en 1994 sans jamais défaillir. Ce qui en fait une des plus anciennes
compétitions homologuées de la chaîne des Pyrénées.
Une course écolo
A l’origine, l’itinéraire de très haut
niveau se déroulait intégralement dans le Parc National des Pyrénées.
Partant de Gavarnie, il fallait remonter jusqu’au col de Boucharo puis
de Gabiétou par le glacier, monter au Taillon, redescendre le glacier
du Taillon, la cabane du Soldat et remonter à la
station. De nombreux équipements de sécurité étaient
mis en place avec balisage. Tous ces équipements étaient totalement
retirés derrière le dernier compétiteur afin de laisser place nette.
Aujourd’hui, l’itinéraire se déroule
plus bas, le plus souvent au départ de la station en raison du manque
de neige de ces dernières années même si une épreuve de la Coupe
du Monde a déjà eu lieu dans l’unique rue de Gavarnie.
Le parcours se déroule en partie seulement dans le Parc National en
suivant scrupuleusement un itinéraire étudié à l’avance afin de respecter
le milieu et le repos hivernal de la
nature. Comme depuis la première année, il y a 17 ans,
tous les balisages et équipements sont retirés une fois passé le dernier
concurrent. En dehors du domaine de la station, il n’existe aucun support
mécanisé. Pas de motoneige, pas d’hélicoptère. La presse doit se déplacer
à pied tout comme les contrôleurs, équipeurs / déséquipeurs, traceurs,
secouristes, etc…
Et puis la course ne dure que quelques
heures…
Partis du parking de la Holle à 8h,
les premiers ont terminé le circuit à 10h à la station et les derniers
vers 11h. Tout se passe vite, dans le
silence de la nature, sans spectateur. Une compétition
uniquement pour le sport, la beauté des paysages, le plaisir du tracé,
le respect du milieu. Rien à voir avec un stade.
Une organisation impressionnante
Accueillir près de 100 concurrents
dans un milieu hostile hors station de ski nécessite une bonne organisation
et des moyens de sécurité. En 17 ans, le Derby
3000 n’a eu à déplorer aucun accident. Seulement en
1994, le candidat en tête a perdu le balisage au sommet du Pic Entre
les Ports dans la tempête et s’est retrouvé… en Espagne. Il est remonté
à Boucharo par ses propres moyens et ses camarades, à l’unanimité, lui
ont accordé la première place. Depuis cette aventure, aucun incident.
Cette année, il y avait 42 bénévoles
sur le terrain dont certains depuis mercredi afin de repérer et vérifier
la stabilité du manteau neigeux et ce pour assurer une sécurité maximum
qui ne peut jamais être l’équation « risque = zéro ».
Le chef traceur est Didier Nogué, CRS au secours en montagne, guide de
haute montagne et spécialiste du traçage de compétitions internationales.
Il est assisté entre autres de Bertrand
Thenoz, Franck Ricard,
Bernard Jumère, Jean-Marc Baron, eux aussi des habitués de cette mission
importante au sein d’une telle organisation. Le président du Jury est Pierre Dupont, de Pelvoux
dans les Alpes, qui a été l’organisateur des championnats de France
par équipe et vertical race de cette année. La FFME supervise l’ensemble
avec un observateur, François
Comte, lui aussi un organisateur de compétition qui
nous vient des Pyrénées-Atlantiques. Toutes les équipes et responsables
sont reliés par radio grâce aux moyens fournis par l’Office départemental
des Sports représenté par Marc Bruning, son directeur. Un médecin, spécialiste
du sport et du secours en montagne est également sur place.
En cas de mauvais temps en dernière
minute, ou de conditions nivologiques défavorables, des itinéraires
de remplacement sont prévus.
Des compétiteurs aguerris
Qu’il s’agisse du parcours A pour le
plus haut niveau de l’open international ou pour le Derby Rando. 1700 m de dénivelé pour le
parcours A en moins de 2 heures
et 1000 m pour le parcours des
jeunes et des « rando » nécessitent une très grande forme
physique mais aussi un haut niveau technique. Il a fallu « dépeauter »
3 fois, descendre un couloir, en remonter un autre sur corde fixe, chausser
et évoluer en crampons, maîtriser la descente toute neige, etc… autant
d’éléments qui nécessitent une certaine pratique même de la part d’amateurs.
C’est sans doute la raison pour laquelle il y a peu ou pas d’accidents
dans ce type de compétition lorsque l’itinéraire est bien pensé, organisé,
préparé, balisé pour que le compétiteur s’exprime pleinement dans un
cadre maximal de sécurité.
Cette compétition, open international
homologué par l’ISMC (fédération internationale), a accueilli des Alpins,
Espagnols du Pays Basque à la Catalogne
et des Andorrans. Il s’agissait également du championnat interrégional
Pyrénées qui a vu la victoire de Haut-Pyrénéens comme Patricia Althapé
du Pays Toy, une habituée des podiums qui s’est particulièrement distinguée
en championnat de France (championne de France Senior) et Wilfrid Jumère,
du Ski Club de Campan chez les seniors.
Les jeunes du département ont également
eu leur lot de satisfaction avec Myriam Penhard en cadette et Julie
Pérez , de Amitié et Nature Tarbes, mais
aussi d’Emmanuelle Penhard en minime qui forme un trio familial de championnes.
Nous devons aussi saluer l’exploit de Michael Veper,
d’Amitié et nature Tarbes, chez les minimes qui a bouclé le circuit
jeune de 1000 m de dénivelé positive
en 1h09.
Le
ski alpinisme pyrénéen de compétition se porte bien.
La relève des jeunes est assurée grâce à une équipe entraînée pratiquement
toute l’année par Patrick Campays. Une détection des jeunes dans les
clubs, une sélection dès l’automne, un esprit d’équipe maintenu en permanence,
c’est ce qui fait le succès de beaucoup d’entre eux qui sont en équipe
de France et gagnent des compétitions telles que les championnats de
France.
Tous les résultats et détails du parcours
sur http://www.derby3000.fr
Et l’année prochaine….
Bien sûr, le Derby existera au moins
comme Open International. Mais peut-être aussi comme épreuve de la Coupe du monde de ski alpinisme.
Toutefois une ombre existe. La Fédération internationale a choisi l’Andorre
comme organisateur des championnats du monde 2010. Selon Pierre Dollo, vice-président
de la Fédération Internationale (ISMC) « il sera
difficile de faire passer deux épreuves mondiales sur les Pyrénées en
2010. Par contre pour 2011, il ne devrait pas y avoir de problème ».
De son côté, Pierre You, Président national
de la FFME (Fédération Française de la Montagne
et de l’Escalade) pense que
« ça sera plutôt pour 2011 » tout en espérant aussi 2010.
Une chose semble certaine : il est tout à fait improbable qu’une
autre compétition
pyrénéenne organise une épreuve de coupe du monde en 2010 ou 2011.
Il faut rappeler que seuls la Trace Catalane dans
les Pyrénées-Orientales et le Derby
3000 ont une expérience des compétitions internationales
et la course du LHM à Luchon pour les championnats de France.
Gavarnie a déjà vu des championnats
de France en 1999, 2004 pour les jeunes et 2006, une épreuve de Coupe
d’Europe en 2001, une coupe du monde individuelle en
2005 et des opens internationaux pratiquement tous les ans. Les équipes
d’encadrement sont donc particulièrement bien préparées à ce type d’événement.
Pour positiver pour les années à venir,
disons que les équipes pyrénéennes pourraient bien disposer d’un petit
délai supplémentaire pour se préparer.
Le
Président National de la FFME sur place
Il est rare de voir dans les Pyrénées
le Président national
de la FFME se déplacer. Et pourtant, il a passé deux jours sur la compétition
pour apprécier le déroulement de cet événement sportif en présence du
vice-président, Luc
Chabrol, également président du Comité Régional. Midi-Pyrénées.
Ce n’est pas la première fois qu’il vient à Gavarnie mais « nous
avons 52 compétitions au calendrier national qui se font sur 4 mois »
nous précise-t-il. Pourquoi ce choix ? L’éventualité d’une compétition
internationale ? Un soutien au Président du Derby, Pierre Dollo, également vice-président
de la FFME mais aussi président du Comité Sportif ski alpinisme et vice-président
de la Fédération internationale ISMF ?
Pour Pierre
You « cette course est une belle épreuve. Les
jeunes sont là pour la relève… c’est important pour une fédération »
nous précise-t-il. De nouvelles conventions d’objectifs vont être signées
avec le Ministère des sports pour deux ans (2010-2011) avec des objectifs
à atteindre. « Il faudra que nous fixions ces objectifs dans les
3 disciplines compétitives et rendre des comptes ». Il convient
donc, discrètement, de repérer objectivement les bons éléments, pas
seulement les compétiteurs mais aussi les organisateurs et ceux qui
s’engagent dans le développement sportif plus que la promotion touristique.
Nous comprenons que tous les cadres fédéraux sont
mobilisés surtout avec 52 épreuves au calendrier.
Docteur des neiges
C’est devenu une banalité sur le Derby 3000, ces 8 dernières
années, le Docteur Pascal Jayais et là, discrètement, qui veille à l’arrivée
des concurrents. « Celui-là est un peu fatigué. Il va se remettre… »
dit-il au passage. « En fait, il y a peu de problème sur cette
course. Les équipes de contrôle sont bien formées et habituées à repérer
ceux qui doivent s’arrêter, abandonner ou se reposer ».
Médecin anesthésiste réanimateur et
médecin du sport, Pascal Jayais est un habitué des compétitions extrêmes
comme le ski alpinisme et les
trails et du sport automobile. Il a également participé à plusieurs
reprises au tour de France cycliste. La course du Vignemale, le rallye
Monte Carlo et bien d’autres encore. Il pratique toujours le secours
en montagne notamment en Ariège et en Corse dans le cadre de missions.
Praticien à la clinique de l’Ormeau-Pyrénées à Tarbes, c’est un habitué
des de l’accidentologie des sports extrêmes. « Sur ce type de courses,
à part quelques chutes essentiellement liées à l’effort, des problèmes
d’alimentation, c’est exceptionnel qu’il y ait de gros problèmes ».
Pour lui, l’encadrement sur le parcours est essentiel. Avec la fatigue,
le compétiteur peut perdre toute « lucidité pour apprécier ou non
s’il doit s’arrêter pour se reposer ou abandonner ». Il s’agit
donc là d’un véritable travail d’équipes entre un encadrement bénévole
pratiquement tous secouristes (obligatoire pour les diplômés de la FFME)
et un médecin toujours prêt à intervenir.
Les secret de la réussite d’une telle
course réside, notamment, dans le choix de son encadrement et la qualité
des ses personnels autant que dans le nombre. N’importe qui ne peut
pas s’improviser contrôleur au sommet du Taillon, sur le glacier du
Gabiétou ou dans un couloir même au Saint André ou sur les crêtes du
Pic Entre les Ports en pleine tempête. La compétence, l’expérience de
la montagne, la maîtrise des techniques s’imposent et font partie des
contraintes d’une telle entreprise. Depuis 17 ans, les équipes du Derby
3000 Gavarnie-Gèdre savent y répondre.
Louis Dollo |