Les spéléos en exercice de secours

Ce n’est pas parce que la vie est dangereuse que l’on passe son diplôme de secouriste. Un accident est toujours possible dans sa salle de bain. En spéléo, c’est la même chose. C’est une pratique sportive de loisirs qui est certainement moins dangereuse que de prendre sa voiture tous les matins. « Dans les Hautes-Pyrénées nous avons un secours tous les deux ans » nous précise Gaël Huchet-Enaud, Conseiller Technique du Préfet. « Et entre la Haute-Garonne et les Hautes-Pyrénées nous n’en avons pas plus d’un par an » nous dit le lieutenant Julien Passeron, de la section montagne de la CRS 29. « Mais il faut toujours être prêt. »

 

Aujourd’hui, c’est le gouffre du Larau, au-dessus de Saint Pé de Bigorre, qui est le lieu de l’exercice. A -250 mètres de profondeur, un homme d’une trentaine d’années a fait une chute en escaladant un mur et a une double fracture tibia et péroné. Voilà le scénario qui, depuis ce matin fait l’objet d’une concentration de quelque 50 personnes. Tous les effectifs disponibles du département sont sur place comme en cas d’accident réel.

 

Le véritable socle des secours en spéléo, ce sont les pratiquants eux-mêmes, le plus souvent bénévoles, autour du Spéléo Secours, complétés par les services de l’Etat. Parmi les services de l’Etat, nous notons la CRS 29 de Lannemezan  dont la section montagne composée de 38 secouristes dispose de 30 spéléos. Le GRIMP Spéléo des sapeurs pompiers avec un effectif de 6 spéléos, le PGHM d’Oloron Saint-Marie avec 6 spéléos sur 11 secouristes complété par une vingtaine de militaires de la gendarmerie venus de brigades. Le SAMU est aussi sur le terrain. Dans les Hautes-Pyrénées, 4 médecins urgentistes sont spéléos. Le département est bien pourvu pour peu d’accidents. Normal. C’est une affaire de passionnés, qu’il s’agisse de professionnels ou d’amateurs. Des passionnés bien préparés pour une activité qui reste très technique. Contrairement à la montagne, la Spéléologie n’est pas pratiquée par des touristes en villégiature. Un minimum de compétences est exigé qui s’acquiert dans les clubs ou auprès d’un professionnel. Ce qui explique peut-être le peu d’accidents et l’engagement personnel des amateurs dans le secours.

 

« Le Spéléo secours a un agrément national pour organiser et gérer la partie souterraine du secours » C’est en définitive la plus difficile et la plus technique et c’est là que les bénévoles sont les plus nombreux. A ces équipes de bénévoles, sont inclus les pompiers du GRIMP. Mais il peut aussi y avoir des CRS ou des gendarmes. « En fait c’est selon les effectifs disponibles, le niveau de compétences des secouristes présents mais aussi de leurs conditions physiques » nous explique Gaël, le conseiller technique. « Sorti du gouffre, ce n’est plus le Spéléo Secours qui gère. »

 

Au fond du gouffre, la première équipe est descendue avec un  « kit d’assistance » pour protéger et rassurer le blessé. Couverture, matériel de premiers soins, nourriture… de quoi tenir pour attendre le médecin et les équipes d’évacuation. Une autre équipe met en place des moyens de communication, avec ou sans fil selon la nature du terrain afin d’informer les autres équipes de soutien et les équipes en surface. Puis ce sera la lente remontée après avoir médicalisé le blessé.

 

La plupart des gouffres sont équipés, ce qui facilite les interventions. Les bénévoles comme les professionnels connaissent bien le terrain. Presque par cœur. En surface, le conseiller technique donne parfois des conseils de détails. « Tu peux t’arrêter à tel endroit… » Le matériel ? Il en faut. Chacun a son matériel personnel. Eh oui, c’est cela le bénévolat. Mais le Spéléo Secours dispose de 600 mètres de corde et les CRS 2000 mètres. « Il y a de quoi couvrir tous les secours du département. » En surface, si le secours dure plus de 24 heures, le PC de la Préfecture assurera le ravitaillement des PC. Aujourd’hui, un PC au stade de Saint-Pé et un PC avancé à proximité dui gouffre. A la Préfecture, salle Jean Moulin, tous les services sont mobilisés en cas de nécessité.

 

Ce système paraît lourd. Plus lourd qu’un accident en montagne. Il faut dire qu’en spéléo, le moindre petit accident mobilise de gros moyens contrairement à la montagne où nous avons de l’espace, de la visibilité, des moyens de communication faciles et l’hélicoptère. Ici c’est très différent. Il faut de nombreuses équipes pour sécuriser le terrain, assurer les transmissions et aider à la remontée..

 

15h20, un compte rendu médical complet arrive par radio au PC. Le bilan avait été fait à 13h10 mais il a fallu attendre que les moyens de communication soient opérationnels dans le gouffre. On mesure déjà la difficulté pour un accident qui serait banale si vous étiez tombé d’une échelle. La remontée a débuté. Ils sont au premier puit de 16 mètres (P16). En surface, tout est noté. Une main courante, la position de chaque équipe mais aussi de chaque secouriste, les heures d’engagements, le temps passé, etc… A son arrivée, chaque « personnel » a rempli une fiche  mentionnant son niveau de compétences. Le conseiller technique sait ainsi qui il doit et peut engager dans l’opération. Mais aussi où se trouve chaque personne.

 

Un véritable travail de pro où amateurs et professionnels travaillent ensemble sans aucune distinction. Un bel exemple de solidarité. Bravo !

 

Le prochain exercice de secours dans le département sera un exercice régional prévu en septembre / octobre 2009 dans les Baronnies au gouffre du Bassia à -400 ou -500 mètres sous terre.

Louis Dollo

Cartes du gouffre Larau (138 ko; .pdf)

Mis en ligne samedi 26 avril 2008