Parc National des Pyrénées : le trouble s’installe

 

Si la procédure de consultation est terminée depuis le 25 juillet, le malaise n’en est pas moins dissipé. Une consultation curieuse qui s’est faite à une période où des élus sont absents notamment dans le Béarn en raison de leur présence dans les estives ou occupés aux travaux des champs à constituer des réserves d’herbe pour l’hiver. La très grande majorité des élus locaux, départementaux, régionaux et parlementaires n’ont d’ailleurs pas lu les 68 pages du dossier d’enquête publique http://www.pyrenees-pireneus.com/PNP-NouveauDecret-DossierConsultation.pdf . Mais plus on avance dans le temps, plus une prise de conscience se fait jour.

 

Dans sa contribution à l’enquête publique, la SHEM, exploitant hydroélectrique en Béarn précise : « Si ces règles devaient s’appliquer aux zones périphériques, cela serait de nature à empêcher tout développement hydroélectrique dans les Pyrénées. » De son côté, le maire de Lescun, François Baye fait part d’une certaine exaspération : « zonages divers, Parc National, Natura 2000, classements divers, classements de sites, un véritable assaut pour s’accaparer l’entière gestion des territoires de montagne. Oubliés les usages séculaires des Pyrénéens et leur abnégation à faire vivre la montagne… »…  « Pourquoi vouloir, au détriment de la libre administration des collectivités locales, se doter de tous les moyens de gestion pour assurer une mission (partagée) de protection de l’environnement ? Vous l’avez déjà depuis plus de 40 ans ! »

Du côté des Hautes-Pyrénées, si certains maires ont flairé le piège sui se referme sur eux comme Pierre Gerbet à Arcisans-Dessus, d’autres n’ont pas réagi. Pour François Maïtia, Président du Comité de massif « le Parc National est une réalité. On ne va pas  tout refaire. » En fait, il n’a probablement pas lu tous les détails de l’opération qui est « une véritable tromperie ». A la Chambre d’Agriculture et à la FDSEA 65, on commence à s’interroger sérieusement sur la gestion des estives qui reviendrait au PNP et non plus aux structures traditionnelles comme les communes, groupements pastoraux ou commissions syndicales. Déjà dans un rapport de 2007 sur « Gavarnie-Mont-Perdu- Patrimoine mondial » il était évoqué le retrait de la gestion des estives à la Commission Syndicale de la Vallée du Barège clairement acquise par une ordonnance de Louis-Philippe du 8 mars 1839 confirmant des pratiques « démocratiques » déjà vigueur au Moyen Âge.

 

L’affaire sent le chaud quand même puisqu’au cours de la dernière commission permanente, il a été décidé que le directeur par intérim du PNP et le Président Georges Azavant tiendraient des réunions publiques en Bigorre et Béarn pour expliquer les enjeux. Curieusement, une de celles-ci s’est faite dans l’intimité de la Mairie d’Arcizans-Dessus hier soir. Bravo la transparence !

 

Un agent de collectivité territoriale qui s’est penché sur le sujet nous dit : « avec le projet de nouveau décret, tout est interdit sauf ce qui est autorisé par le directeur du PNP. » Et il précise : « Ce principe est contraire à la constitution et son annexe, la déclaration universelle des droits de l’homme, qui stipule que tout ce qui n’est pas interdit ou réglementé par la loi est autorisé. » Le juridique s’en mêle et déjà des dossiers sont en cours de constitution pour attaquer tout ce qui se présentera. Chez certains élus, l’idée serait de « détruire le Parc National pour faire un vaste Parc Naturel Régional où le pouvoir serait réellement entre les mains des élus et non d’un fonctionnaire nommé par le ministre de l’Ecologie. »

 

A titre indicatif, nous relevons quelques points dans le document de consultation :

  • « un principe d'interdiction des travaux est posé. » ce qui n’est pas sans poser de problèmes pour les refuges et cabanes de montagne de même que pour les parcs de tri et de contention des animaux d’élevage. « D’un côt ils veulent des ours et nous imposent des contraintes de pratiques d’élevage avec gardiennage, cabanes, et parcs  et de l’autre on nous interdit ce qui est préconisé en zone ours. Cela manque de cohérence »
  • Dans un objectif de protection du paysage, les communes qui adhérent à la charte, rendent de droit la publicité interdite à l’intérieur des agglomérations comprises dans l’ « aire d’adhésion » et conservent la possibilité de déroger à cette interdiction en instituant des zones de publicité restreinte comme dans les parcs naturels régionaux. Ce qui a pour effet d’enlever toute initiative aux conseils municipaux et élimine beaucoup de choses dans les stations de ski et l’occasion d’événements comme des compétitions de ski alpinisme qui n’existent que par des sponsors.

 

Selon certains élus, l’affaire prend la même tournure que pour l’ours. « On veut nous faire avaler la couleuvre de nous retirer nos droits pour lesquels nous avons été élus  avec des pseudos consultations. On veut nous imposer la régression économique et social.» Ce qui, déjà, laisse penser que nous ne sommes pas très loin de voir des conflits éclater.

 

Louis Dollo, le 6 août 2008

 

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Mis en ligne jeudi 7 août 2008-6h47