Ours : les éleveurs iront-ils à la table du dialogue ?

 

Jeudi prochain, doit se réunir à la préfecture de Région à Toulouse, le Groupe National Ours qui se veut être » une instance de dialogue » ayant pour mission « de favoriser et d'entretenir la concertation.» Belles et nobles intentions mais il semble bien qu’il existe un sérieux problème.

 

L’article 1 de la décision du préfet de Région Dominique Bur donne le sentiment que celui-ci ne connaît pas le dossier ou refuse de prendre en compte certaines réalités de terrain qui perdurent depuis 12 ans. A croire que l’Etat veut entretenir le conflit par une provocation.

 

Il est dit que le Groupe National Ours est réuni pour « la mise en œuvre du Plan de restauration » et qu’il doit formuler « des propositions sur l'évolution et les améliorations à apporter à ce plan de restauration.»

Le problème est que l’opposition tourne essentiellement autour de deux axes :

 

1/ les acteurs des territoires n’ont jamais accepté le Plan de restauration pour lequel ils n’ont jamais été consultés au préalable.

2/ Dans leur motion pour « une montagne vivante et préservée », ils demandent la dissolution du Groupe Ours et l’arrêt du plan de restauration en ces termes :

  • « DEMANDENT l’arrêt immédiat des introductions d’ours sur le territoire français,
  • « DEMANDENT la dissolution du groupe ours et du groupe loup, ce dernier statuant sur la présence de ce prédateur dans les Pyrénées sans que n’y siège un seul représentant du massif,… »

 

Face à cette situation de blocage, il y a peu de chance pour qu’un dialogue puisse être engagé.

 

Par ailleurs, nous constatons que le rapport final LIFE de 2000, suite aux premières introductions de 1996 et 1997, liste dans son § 4-3 (pages 46 et 47) toute une série de critiques qui sont toujours d’actualité.  Dans le § 4-5, page 48, il est précisé : « Ce bilan plutôt controversé s’est conclu de la part du Ministère de l’Environnement par la confirmation de la volonté de l'Etat à moyen et long terme d’établir une population d’ours dans les Pyrénées, mais affirme qu’elle ne se fera pas contre les Pyrénéens. La période qui va de 2000 à 2002 sera nécessaire pour améliorer la concertation, établir un bilan complet de l'expérience pour décider de continuer ou non de vivre avec l’ours. » En quelque sorte, on poursuit l’expérience et on se moque des critiques précédentes tout comme de l’avis des Pyrénéens. Ce qui a été confirmé dans les faits entre 2000 et 2008 avec cinq introductions en 2006.

 

Mieux encore. Page 48, § 5-1, il est dit : « Après 6 ans, les résultats concernant le développement autour de l'image de l'ours reste faible. Bien que l’ADET souligne par ailleurs, que son territoire est désormais repéré, en France comme en Europe, comme le “ pays où les ours ont été réintroduits ”, et que l'image de l'ours soit utilisée par de nombreux restaurateurs, campings, agriculteurs, apiculteurs , offices du tourisme , accompagnateurs de montagne ou commerçants sur le Massif Pyrénéen, les porteurs de projets et les élus n’ont pas cru à l’ours en tant que promoteur de développement économique. »

Après le constat d’un tel fiasco, avec le gouffre financier que cela représente (Cf. Rapports de missions parlementaires), il est assez incroyable de voir qu’en 2008 il y a toujours des personnes qui croient au développement économique par l’ours. Force est de constater qu’aujourd’hui l’ours constitue plus un rejet qu’un moyen de développement… ce qu’il n’a jamais été au cours de l’histoire. Nous nous éloignons de plus en plus de l’acceptabilité sociale indispensable pour le fonctionnement d’un tel plan. Le programme LIFE Coex a d’ailleurs été superbement ignoré des collectivités locales et des acteurs du tourisme et de l’élevage.

 

Poursuivre un tel plan, se réunir pour envisager sa mise en œuvre alors que rien n’a été fait préalablement par manque de moyens financiers de l’Etat, de cohérence et d’acceptabilité au cours des 12 dernières années, devrait conduire à une décision raisonnable : arrêtons la gabegie. Ce plan n’a aucun espoir d’aboutir sauf par la force dans les vallées.

 

Si les éleveurs et les élus des vallées font le voyage de Toulouse, porteront-ils ce message ?

 

Louis Dollo

Mis en ligne mardi 16 décembre 2008-9h30