Récit n°21

Mercredi 25 Juin : Traversée du désert de Gobi en train de nuit /Dunhuang/ Mogao/Dunhuang.

Salut René ! Je dois avant tout te remercier du gros effort que tu as accompli pour réussir cette opération Transmission Sans Fil. Je connais le régime spartiate que tu t’imposes pour tenir ton poids de forme, et je mesure l’énorme sacrifice que t’a couté d’avoir à ingurgiter la recette du Lama. Mais ça a marché. Tu ne peux pas savoir à quel point ta randonnée au Chiroulet a rafraichi l’atmosphère dans notre compartiment. C’est juste celle là qu’il nous fallait. Il est dommage que tu ne puisses renouveler cette expérience. Tu pourrais le faire, mais il faudrait doubler les doses à chaque fois. Impensable ! Pour moi, le problème ne se pose pas alors je vais te raconter notre¨ traversée du désert¨. C’est en car que nous quittons l’hôtel ou pendant deux jours en relaxation complète nous avons mis à jour ce tout ce que nous avions obligatoirement négligé. Ürümqi est une ville immense, une heure a été nécessaire pour arriver à la gare. Dans un train couchette tout neuf, les lits sont d’une propreté et d’un confort surprenants. Nous prenons rapidement nos places. Aussi précis qu’un convoi S.N.C.F. notre Trans-Gobi-Voyageurs, démarre à 20h.40. Le coucher du soleil est splendide sur un paysage nu et désolé. Comme aurait dit Coluche : « Circulez y a rien à voir. » Le temps passe, toutes fenêtres baissées, nous profitons du courant d’air (chaud) pour supporter bec grand ouvert, l’haleine Luciférienne du Gobi. Cela fait plus de trois heures que nous roulons dans cette atmosphère torride. Nous sommes secs comme des barreaux de chaise, nos légers vêtements pompent l’eau au fur et à mesure que nous la buvons. Le soleil a disparu mais la température est encore élevée. Je suis assis maintenant comme convenu sur le marchepied du wagon, j’attends confiant ta venue. Les yeux fermés, je perçois un picotement dans mon lobe occipital, ton image s’y insère et je reçois ton récit 5/5. Sans turbulence néfaste, elle s’incruste dans ma mémoire et je revois la vallée, la grange à penaùs où fleurissent les lilas. Je distingue nettement le Merlheu et le Bizourtère enneigés. Je vois aussi Colnago et Alexine qui se font des mamours. Et puis je vois la grande croix au sommet du Pic du Jer, elle recule, devient plus petite, s’estompe et disparait lorsque la voix d’Estoup murmure à mon oreille : « Allez, rentre, viens dormir ! ». Mais il fait encore trop chaud, et personne ne trouve le sommeil. Ça discute mollement lorsque je rejoins les copains. Ils sont au courant de notre tentative et se tournent vers moi, anxieux. « Et alors ? Et alors ?» Moi, j’entonne heureux de ma trouvaille : « Zorro est arrivé é é, sans presser, er, er !» Et je leur raconte ta montée au Chiroulet. On sent la fraîcheur et l’air des Pyrénées entrer dans le compartiment au fur et à mesure que je raconte. Aux amours d’Alexine et Colnago, à peine ai-je attaqué Ché bella cosa, que tous les auditeurs sont endormis. Le soleil est déjà haut dans le ciel lorsque nous nous réveillons. J’allais commencer mes commentaires légèrement immodestes, mais immédiatement j’ai été devancé par le chœur de mes amis : « Magnifique, la montée au Chiroulet, on en aurait bien pris un petit supplément, mais quand on t’a entendu chanter O Solé moi, l’envie de dormir a été irrésistible. » Et voilà, comme disait le Papé de Pagnol, « Fa du bien à Bertrand, té lé rend en caguant. » Une grande partie du désert de Gobi est traversé sans souffrance, et c’est le principal. La dimension du petit déjeuner ne nous cause aucun problème, et termine en point d’orgue ce transfert ferroviaire. C’est avec une ponctualité quasiment helvétique que nous entrons en gare de Dunhuang. Immense, neuve et moderne, elle est tout à fait dans la ligne du développement de ce Pays. L’installation dans les hôtels se fait rapidement, les mollets nous démangent. La visite prévue est celle de Mogao Ku. Les grottes de Mogao sont nichées dans des falaises qui s’élèvent au milieu de …de rien. Tout autour, c’est la plaine désertique. Elles sont là, creusées pendant sept siècles (du IVème au XIème) et n’ont été stoppées que par l’implantation de l’Islam. Sur les 735 cavernes entretenues, seulement trente sont ouvertes au public. Par ses peintures et ses sculptures, l’immense pinacothèque, est dépositaire de mille ans d’histoire. Les falaises, seuls obstacles au vent du désert, furent recouvertes et protégées par celui-ci. C’est après la Révolution Culturelle qu’elles furent dévoilées. Allez juger les révolutions ????

Jeudi 26 Juin 2008 : 86 ème étape, Dunhuang-Anxi / 121km.

On a beau être amoureux de la nature et explorateur dans l’âme, les nuits d’hôtel sont nettement plus prisées que les campements dans le désert. Un seul inconvénient, les hôtels en principe sont situés au cœur de la ville, et le cœur de la ville, c’est très bruyant surtout le matin. Ne râlons pas trop puisque le réveil sonne à 5h.20 pour un départ à la fraîche. Quand je te dis que la Chine est immense et pleine d’imprévus. Devine où nous allons pédaler ce matin ? Dans le désert de Gobi. Eh oui ! Nous en avons traversé 1000km. en train, et il en reste. Te dire combien, je l’ignore, car mon porte carte a disparu, hier au soir lors de mon arrivée à l’hôtel. Ça n’a plus grande importance, une nouvelle organisation est née pendant notre voyage. Plus naturelle, donc plus conviviale et mieux acceptée que celle plus spéculative des têtes pensantes fédérales. Bien sur l’organisation reste en place assumant sans faiblesse ses responsabilités. La fusion des races de couleurs différentes, doit être une bonne chose en soi, puisque nos tribus colorées ont fait abstraction de la teinte de leur maillot pour former des pelotons arcs en ciel plus chatoyants. Plus de rouges, de noirs ou de bleus, seulement des copains roulant ensemble par affinité. Les Gros mollets tournent grosse plaque quand ça leur chante, les Photographes numérisent les paysages et les Fleurs bleues s’extasient devant un chardon, seule plante vivace dans ce pays ou même les cactus crèvent de soif. Bref, tout tourne rond dans le chaudron, seules nos pédales font office de ventilateurs. C’est peu. Il parait que certains ont aperçu des gazelles. Je suis inquiet, car le soleil tape dur sur les casques. Pour la première fois dans ma vie cyclo-touristique, je souhaite que le vent tourne pour nous rafraichir les narines. Manque de chance, il souffle trop faiblement dans notre dos pour aider efficacement notre progression et nous respirons cet air à 40° qui brule nos sinus. Heureusement, tout désert a ses oasis. Au kilomètre 95, des marchands de pastèques abrités sous des paillotes de fortune, veulent bien partager leur ombre. Hospitalité légendaire des gens du désert. Le pique-nique est en place et nous goûtons aux délices agricoles qui nous sont présentés. Bien sur ces pastèques que l’on trouve délicieuses, ne sont pas comparables aux melons de Cavaillon bien frais, mais les proverbes sont universels. Il est bien de circonstance le notre de Bigorre: quoan la hàmi pique, qu’ey boune la mique ! Quand on a faim, elle est bonne la pâte. Il ne reste plus qu’une vingtaine de kilomètres, et nous retrouvons sans grande allégresse les joies du camping. Joies du camping, joies essentiellement éprouvées par la jeunesse car au fur et à mesure de l’avancée en âge, elles se transforment en courbatures. Mais comme le repos est chaque jour davantage apprécié nous ne perdons pas de temps en réflexions stériles sur notre mode de délassement. Soyons heureux que nos tentes se camouflent sous les arbres maigrelets d’une usine désaffectée qui dispensent une ombre chiche. Un petit bonheur est toujours bienvenu.

Vendredi 27 Juin 2008 : 87 ème étape, Anxi - Yumen-Zhen / 126 km.

Le Gobi a essayé de nous gober ! Ah ! Tu ne sais pas ce que c’est que le désert, eh bien nous non plus ne le savions pas. Aujourd’hui, j’ai compris pourquoi les chameaux ont deux bosses alors que les dromadaires n’en ont qu’une. Deux précautions valent mieux qu’une, les chameaux l’ont découvert avant nous. Cent quarante et un kilomètres sans bosse, c’est inhumain ! Le Gobi, c’est pire que tout ce que l’on m’en avait dit. Le Gobi, c’est un vent de face qui te brûle les sinus pire que quand il te pousse derrière. Le Gobi, c’est une fournaise où ta sueur sort déjà en vapeur par les pores. Le Gobi, c’est aussi plat que ta carte topo, mais là s’arrête la ressemblance. Par contre notre ressemblance à nous se rapproche terriblement de la merguez. Si ça continue longtemps comme ça, nous allons être bons à bouffer. Bon, j’arrête de me plaindre, c’est l’heure du casse-croûte. Menu à l’Italienne, Pâtes Bolognaises à volonté et pastèque. Oooouuummm ! Délicieuses ces pastèques, choouuruuup, oouuum, ce jus aussi bon que la goudale, chaud tout pareil. On n’est pas d’ici, il reste 45 bornes pour quitter le barbecue. Bouddha veille, il n’est pas raciste pour deux ronds, à 25 kilomètres de l’arrivée, il nous offre un bain de pieds dans le canal latéral à …l’autoroute. Bain de pieds à l’eau chaude S.V.P. Une rangée d’arbres alignés au cordeau, nous dispensent leur ombre salvatrice. La température fraîchit et c’est un hôtel modeste, qui pour nous ce soir vaut un palace. Ouais ! Le Gobi a essayé de nous gober, il a du nous trouver indigestes, il ne nous a pas avalés.

Samedi 28 Juin 2008 : 88 ème étape, Yumen-Zhen – Jiayuguan / 141km.

Sept heures, le peloton s’élance mollement, essayant de découvrir ce que le désert lui mijote comme traquenard. Chat échaudé craint l’eau froide, hier nous avons été plus qu’échaudés et voyant le ciel couvert ce matin, une ride gonflée par toutes les suppositions possibles barre notre front. Mon copain Estoup, à défaut d’être Chinois est légèrement chineur. Il m’interpelle au bout de quelques kilomètres la boutade au coin des lèvres : « Tu as vu Alain, ces Chinois sont vraiment attentifs au bienêtre des cyclos, ils ont installé des ventilateurs tout au long de la route.» Ce n’est pas croyable. Tu connais les Landes, ici c’est pareil, sauf que les pins sont remplacés par de gigantesques éoliennes. C’est le deuxième champ de cette importance que nous rencontrons. Tu me diras que ça ne gène personne, et pour la vue, il reste bien assez de vide dans le désert pour contenter tout le monde. Il y en a un bon millier à tourner leurs grands bras, brassant l’air avec des tchouf, tchouf, tchouf anesthésiants. Seul Don Quichotte aurait été à son affaire, il ne se serait pas laissé endormir lui. Aucune velléité ne se manifeste dans notre peloton apathique. Nous traversons aussi prudemment que si c’était un champ de mines. Il est 8h30, et une petite bruine vient humecter nos visages tannés. Quel plaisir de pouvoir souffler vers le haut afin de faire envoler la petite goutte d’eau qui inlassablement désescalade et chatouille le bout de notre nez. La route est vallonnée, large, en pente légèrement montante et sans circulation. Croyant que la bruine ne suffisait pas à notre bonheur, Bouddha toujours prévenant, augmente la dose et ouvre ses robinets. Personne ne s’en plaint, on en a vu d’autres ! C’est la deuxième fois qu’il pleut dans la région depuis le 1er de l’an. J’aimerais bien savoir qui sont les heureux profiteurs de la première douche. Nous voici remontés à 2200m. d’altitude. Dans cette ville pétrolière en fin de course, la chose la plus remarquable aujourd’hui, c’est le pique-nique qui nous y est servi. Hautement apprécié le pique-nique, il laisse les visiteurs absolument muets. Une descente de 50km. sous un soleil revenu, nous conduit accompagnés par la police à Jiayuguan. La petite ville serait insignifiante, si sa forteresse de l’époque Ming ne lui donnait une notoriété certaine. Fortification occidentale de la Grande Muraille, elle domine la plaine et porte le nom justifié de : ¨Passe imprenable sous le ciel¨. Deux portes permettaient le passage des murailles. Côté oriental, la ¨Porte de l’Éveil¨ permettait d’y entrer. Coté occidental, la ¨Porte des Soupirs¨ laissait sortir vers les pays barbares, les fonctionnaires en disgrâce ou les criminels bannis. Le mur en terre qui part de chaque côté du fort, barre la route entre les deux massifs montagneux du Qilian et du Mazong. A 18h.30 un car nous prend en charge et nous amène au restaurant où une énorme surprise nous attend. Un concours de chefs cuisiniers y est organisé. Nous somme invités à y participer en tant que spectateurs ravis et dégustateurs appliqués. Sur les tables, sont exposés des plats dont la décoration à elle seule nous récompense de la longueur du trajet. Onze mille kilomètres pour voir ces merveilles, ce n’est pas cher payé. Nous trouvons dommage malgré la salive qui envahit notre bouche, d’avoir à démanteler ces chefs-d’œuvre. Nous y sommes poussés (ne poussez pas si fort, on y va, on y va ) par les chefs et les organisateurs soucieux de connaitre l’opinion des meilleurs dégustateurs mondiaux. Comme vous le savez, la cuisine Française est réputée être la meilleure du monde, il faut en déduire que les Français sont les meilleurs dégustateurs. C’est comme ça et sans plus de scrupule que ne le permet la bienséance, nous attaquons à l’arme blanche toutes les succulences qui nous sont présentées. Un fameux vin de la région, nous est offert par le directeur du tourisme. N’ayant que voix consultatives, et ne parlant pas le Mandarin, c’est par onomatopées que nous faisons connaitre nos préférences. Choix difficile pour les jurés, entre les oouu, mmuummm, et autres ooohhh extasiés. J’ai même cru ouïr un : « Pu…rée que c’est bon !» incongru. Après un tel repas une promenade digestive s’imposait. Soirée inoubliable ! Un somptueux spectacle, avec concert et danses, entrecoupé par la remise des prix aux Vatel locaux, nous est servi en supplément. Vive la Chine et les Chinois. Ils nous ont fait goûter à des Chinoiseries Haut de Gamme.

Dimanche 29 Juin2008 : 89 ème étape, Jiayuguan – Quingshui / 93 km.

Cette soirée sera un des plus beau souvenir de ma vie. Absolument magnifique autant qu’inattendu. Le tout réglé à la perfection, orchestre, danses, enfin tout le spectacle y compris les merveilles culinaires tout, tout était régi avec une minutie et un soin appliqué que l’on ne trouve à ce niveau, qu’en Chine, il faut bien le dire. Un immense merci pour cette invitation généreuse et fraternelle. Ce matin c’est encore la fête dans cette ville qui se prépare à recevoir la flamme Olympique le 7 Juillet. A voir avec quel enthousiasme il accomplit son travail pour les recevoir, on mesure ce que représentent les J.O. pour le peuple Chinois. L’ouverture au monde extérieur si longtemps caché, donne à cette manifestation une ampleur qu’il nous est difficile d’imaginer. L’accouchement de la liberté ne peut se faire sans douleur, la parturiente trop jeune encore pour cela, bridée par des siècles de dictatures, subit en conséquence des contractions douloureuses. Mais jurons qu’elle ne souffrira plus trop longtemps et que la délivrance est proche. Ces Jeux seront et nous le souhaitons du fond du cœur, la gymnastique respiratoire qui permettra une libération rapide et indolore.

La journée s’annonce belle et ensoleillée, seule ombre, la discipline responsable que les capitaines de route sont obligés de maintenir, n’est pas du goût de tous. Il y a encore quelques mutins qui n’ont pas compris que plaire à tout le monde et à son père est quasiment impossible. Dans une expédition comme la nôtre, il est indispensable que les choses soient organisées en fonction du groupe. Ce que certains individualistes ou égoïstes ne peuvent admettre. La bride sur le cou n’est nécessaire que lorsque les intérêts différent exagérément, c’est rare heureusement, mais ça arrive. Il faut alors imposer la règle, c’est au capitaine de faire ce pourquoi il a été requis. Ces petits orages internes, passent rapidement sans grosses conséquences, sinon quelques coups de gueule vite oubliés. Cela permet aussi le temps de la réflexion, de parcourir des kilomètres inconsciemment, avec facilité. Revenons à notre promenade journalière. Au petit village de Jiuqian, un groupe de cyclistes chinois, nous accompagne durant la traversée de la ville. Nous passons dans des hameaux perdus où sur le bord de la route, des marchands de fruits et légumes font le chiffre d’affaire de l’année à notre passage. Est-ce la peur du scorbut qui fait dévaliser les étals en moins de temps qu’il n’en faut pour manger une cerise. Nous ne sommes plus au temps des Corsaires et de la Royale, non, c’est simplement l’appétence de ces fruits et la fringale permanente des cyclos qui réunies imposent ce festin frugal. Question vitamine, la provision est faite. Des petits cochons de lait, enfermés dans des sacs de jute et conscients peut-être du sort qui les attend, hurlent leur désarroi. Nous reprenons notre route maintenant dans le désert. C’est la paix, la grande paix du monde où justement il n’y a pas grand monde. Il n’y a que nous, on ne voit que l’horizon tout fin, loin, loin, loin, on entend que le vent léger siffler doucement à nos oreilles. Pas de discussion, seulement la communion complète avec une nature discrète et réduite au minimum. Philosophes, ermites, anachorètes de tous poils, c’est ici dans le désert que vous atteindrez votre Nirvana. Par contre un terrain de foot bordé de saules pleureurs, campement dressé, pique-nique installé, cyclos prêts à l’assaut des tables et à la sieste, suffit à notre bonheur du jour et de la nuit.

Lundi 30Juin 2008 : 90ème étape, Quingshui – Gaotai / 94km.

La chose la plus incroyable pour nous occidentaux gavés d’informations plus ou moins tendancieuses et dirigées, c’est le sentiment de LIBERTÉ que l’on éprouve en circulant dans cet immense pays. Nous avons rencontré moins de policiers en 1000km. que chez nous entre Tarbes et Lourdes. Mais foin d’assertions catégoriques et définitives, attendons encore un peu pour affirmer. Pour le moment, c’est ce sentiment qui domine. Tiens justement en parlant de kilomètres, tu sais puisque tu nous suis que nous venons de franchir notre borne interne de 10.000 km. (Pour ma part, j’en suis à 11.300). C’est phénoménal ce que peut faire un homme lorsqu’il est motivé. Calcule un peu ce que mathématiquement ça donne avec un développement moyen de 5 mètres : 2.260.000 tours de pédale. Un mulet ne le ferait pas ! Bon avec ton cartésianisme intransigeant, tu vas me dire qu’un mulet ça ne fait pas de vélo. Je sais, mais c’est une image. Autre chose aussi qui surprend ici, c’est le retour en quelques kilomètres du 21ème siècle au Moyen-âge. Sur la place, les bouchers donneraient du fil à retordre aux inspecteurs sanitaires. Les normes Européennes en prennent un sale coup dans les paragraphes. La chambre froide n’existe pas. Tout est à la température ambiante, et les mouches ne se tordent pas la trompe en suçant une viande de porc toute mollasse. Bref continuons sur cette route sans relief, sans difficulté, sans paysage, sans ombre, mais avec de temps en temps de petits villages qui subsistent grâce à une horticulture primitive. Des champs de légumes avec de belles salades entourent les maisons. Quand je te dis que la gentillesse est latente sur notre Terre et que les peuples sont faits pour s’entendre. La preuve nous en est une fois de plus donnée dans ce petit village où nous nous arrêtons pour le pique-nique. C’est dans la cour de l’école où les enfants sont encore en classe que les tables sont dressées. Deux bonheurs en même temps, celui de ces écoliers qui quittent des devoirs rébarbatifs, et le notre lorsqu’ils nous offrent leur tabouret avec un sourire à faire fondre un cœur de vautour. Les pâtes de fruit distribuées scellent une amitié éternelle. A quelques tours de roues, la petite ville (100.000habitants) de Gaotai, où les gratte-ciels n’ont pas éradiqué la jolie architecture régionale, nous propose ses trois hôtels. Un jour et demi de repos, tu crois que l’on aurait pu refuser ?

Je ne veux pas déclencher une guerre, mais il y a des fois où je changerais Céleste contre un bazooka. Et pourtant tu sais si je l’aime celle-là. J’entends encore une réflexion à la noix : « En ce qui concerne les capitaines de route, je regrette que ceux-ci n’aient pas été à la hauteur de l’espérance que nous pensions trouver en eux.» Qu’est qu’il espérait celui-là ! Trouver en nous des Merlin l’Enchanteur, des Mandrake rois de la magie, des Oudini qui changeraient sa bécane en vélo Solex lorsqu’il prend un coup de pompe ? Et puis quoi encore, est-ce qu’il s’est demandé cet oiseau rare si nous le trouvions à la hauteur de ce que nous attendions de lui, participant. D’abord étymologiquement un participant, c’est un mec qui participe, et non celui qui parce qu’il a payé doit être servi comme un prince. Et merde alors tout le monde a payé, et en plus y en a qui bossent. Je voudrais les y voir ces critiques invétérés, pourquoi ne se sont-ils pas présentés lors de la composition des groupes ? C’est devant qu’il faut tirer pour faire avancer le schmilblick, et pas aboyer derrière. T’as jamais vu un âne, pourtant le moins con des animaux pousser une charrette ? Non ! il se met devant. Là j’arrête parce que je frise l’apoplexie. Je me calme, allez Alain zen !

René Delhom

Dernière mise en ligne mardi 15 juillet 2008

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