Le Maillon Juin 2007

Ce mois de Juin a été marqué par de violents orages. Heureusement, ils éclataient souvent assez tard dans la soirée, et n’ont pas empêché comme aurait dit La Fontaine, ‘’la gent cyclotante de cycloter’’. Il faut quand même avouer que cette épée de Damoclès particulièrement trempée, n’incitait pas nos pédaleurs à faire de grandes randonnées. Les Randonneur, en début de mois, se sont affûté les mollets :

En remontant l’Ouzom

Six heure, je mets le nez à la fenêtre, pas un nuage dans le ciel. Sur le programme des Cyclo-randonneurs Lourdais, il est prévu de monter au col du Soulor versant Ferrières. Ce temps magnifique, digne d’un 14 Juillet, m’incite à partir un peu avant les copains. Pour plusieurs raisons, je préfère prendre un peu d’avance. D’abord, je suis encore à court d’entraînement, ma surcharge pondérale ne s’est pas estompée rajoutant un handicap certain à mes soixante quinze ‘’ balais’’, et j’ai surtout envie de prendre en photo les paysages somptueux qui vont m’être offerts. Après un copieux petit déj’, je démarre en sifflotant lorsque le quart de sept heure sonne à la pendule.
Un petit vent me souffle son haleine glaciale sur la figure. Même pas grave, comme dit mon petit-fils, je suis bien couvert et si à Vizens le Gave fait encore chuter la température, la côte de Sarrastets a tôt fait de compenser la perte de calories. Je traverse Saint-Pé où trois personnes le journal grand ouvert, discutent sur la place. Au passage à niveau, très dangereux pour les cyclos, le T.G.V. défile en chuintant. Les barrières se lèvent et j’ai parcouru quelques centaines de mètres lorsque je m’arrête désolé. Une jeune chevrette vient d’être fauchée par une voiture. Elle s’ajoute à la longue liste des petits morts de l’été. L’Automobile a payé elle aussi son tribut à la collision car le talus de l’autre côté de la chaussée est profondément labouré.
A Lestelle-Bétharam, le soleil est levé et sa bienfaisante apparition, me remonte le moral. Je pédale avec entrain, Asson est contourné, je regarde ma montre. Il est huit heure, les copains vont s’élancer derrière moi.
Arrivé à la ‘’Maison d’Henri IV ’’, j’ai la chance d’apercevoir le propriétaire. C’est la première fois que j’y vois un occupant. J’en connaissais un peu l’histoire, mais l’occasion s’offrait de l’entendre à la source. Elle va allonger le récit de cette randonnée, mais je ne peux résister au plaisir de vous la narrer.
On appelle cette maison, la maison d’Henri IV, ce n’est pas totalement vrai. En fait Henri IV, bien qu’il soit né à Pau, a passé toute son enfance au château de Coarraze. Il avait huit nourrices pour suffire à son approvisionnement. Etait-ce par appétit grandiose, par gourmandise de ce bon lait non écrémé, ou bien, notre Vert Galant adorait-il déjà téter les tétons ? Allez savoir avec un gaillard de cette trempe. Toujours est-il que notre rusé monarque, très en avance pour son âge, venait d’inventer la coopérative laitière. Mais une seule des sociétaires ici nous intéresse.
Elle se nommait Arnaudine de Lareù. Pour la récompenser de ses bons et ‘’lolos’’ services, Nousté Henric lui fit cadeau d’une petite grange avec terrain attenant, plus une pension à vie assez substantielle qui se montait à 60 livres tournois par an. A ce prix là, ce devait être un lait A.O.C. sûrement. Avec ses revenus, Arnaudine fit construire la maison à pénaùs que l’on voit de nos jours (avec un crépis tout neuf) passé Arthez d’Asson, à gauche en haut de la côte. Plus tard, un complot fut ourdi dans cette maison transformée en auberge où l’on peut lire encore le devise inscrite sur le linteau de la porte : SI a BOCA – a BORSA - 1579 . Autrement dit, si tu as une bouche, tu as une bourse. Un descendant d’Arnaudine, Johanet de Lareù, projeta avec quelques habitants d’Arthez d’Asson, d’occire proprement et simplement l’abbé de Sauvelade qui voulait récupérer les biens de l’Abbaye confisqués par Jeanne d’Albret lors de la Réforme. Ce fut une bien mauvaise idée qu’eut l’ecclésiastique, car nos comploteurs sûrs de leur bon droit, mirent leur projet à exécution. Après enquête et délations, Johanet qui s’était échappé en Espagne, fut arrêté à son retour,et condamné à être roué vif sur les lieux du crime, sa tête clouée à l’endroit du supplice et ses pieds accrochés à une potence, exposés sur la route de Bruges à Louvie. Il y eut foule pour voir mourir Lareù. Les parents amenèrent les enfants et les fouettèrent pour leur faire souvenir que tuer son prochain ,n’est permis que pour raison d’Etat, ou si l’on est assez puissant pour bien se défendre et à la limite, se faire amnistier, sinon c’est un vilain péché. Le vacarme était infernal. Les cris des enfants, les vociférations des curieux assistant à l’agonie de Johanet qui poussait des hurlements de souffrance, accompagnés par les aboiements des chiens, donnaient un concert difficilement soutenable et dont on doit se souvenir toute sa vie.
Bon mais ce n’est pas tout, il faut continuer la route. Elle s’enfonce maintenant dans la vallée où le soleil n’a pas encore montré le bout de son nez. Il fait un froid terrible, je pense que si nos décideurs écologistes étaient ici avec moi, au lieu d’importer des ours de Slovénie, ils trouveraient plus adéquat de les faire venir d’Alaska. L’Ouzom qui coule en sens inverse ne m’incite pas à forcer l’allure, car si lui descend, c’est que moi je monte. C.Q.F.D. Enfin j’arrive sur la petite place de Ferrières. Le soleil m’y a précédé, et j’apprécie grandement son attention. Je déballe mon casse-croûte, étirant mes jambes au maximum, je déguste pleinement cet instant savoureux sous tous rapports et de plaisir, j’en ai les paupières qui se ferment. Vive le Cyclotourisme !
J’ai remarqué au cours de ma vie que les bonnes choses ont une fin plus rapide que les autres. Aïe! Aïe ! Aïe ! soupir de souplesse disparue, mais sitôt redressé ça va mieux. Passons maintenant au morceau de bravoure. Je connais bien la partition et ne me fais aucun souci.
L’attaque du col est rude au départ de Ferrières, mais j’ai prévu. Tout à gauche mon gars ! Je peux voir venir. Je monte à l’aise Blaise et malgré la rudesse de la pente, il me reste assez de souffle pour répondre gentiment au bonjour que m’adresse un cyclo en me doublant. Oh ! je vais en recevoir des Bonjour, ça va ? d’ici que j’arrive au sommet. Mais on s’y fait, ça prouve que les jeunes sont toujours aussi gentils quoi qu’on en dise. Me voici à Arbéost.
Déjà !!! Bon ! bon ! je me méfie du petit coup de cul sournois qui m’attend à la sortie du village avec son virage à droite.
Mais je l’aurai ! je l’aurai ! comme il se dit dans une pub à la télé.

Et je l’ai eu. Facile Basile ! J’enroule et je passe sans souffrir le grand virage panoramique qui domine la vallée. Tout à coup : Le Gabizos est devant moi, magnifique. Je fais une photo, un paysage comme celui là, il faut le mettre en boîte. Et je mouline Céline ! la route défile tout doucement sous mes roues, mais elle défile. A Curebère, en contrebas de la route, les granges semées comme des fleurs dans la prairie réveillent mon âme poétique et je stoppe à nouveau pour photographier cet ensemble pastoral. Que c’est beau ! je souffre pour les cyclistes qui me doublent en soufflant leurs salutations. Ils ne remarquent même pas les beautés qui se dévoilent autour d’eux. Restons sérieux. Maintenant, c’est du 8,5% permanent que je vais devoir grignoter jusqu’aux falaises du pas de Tartas. Je maintiens une vitesse de 6 à 7 km./heure. Quand je songe aux souffrances de Lareù, j’en oublie les petites douleurs qui grignotent lentement mon moral. Me voici au panneau annonçant le sommet à 4 km. Tout va bien Sébastien ! Le cirque du Litor se déploie et mes yeux ne sont pas assez grands pour en mesurer toute sa splendeur. La route du col d’Aubisque trace une noire cicatrice sur la muraille grise. On se rend compte qu’entre les deux tunnels, ça monte aussi. Et je continue mon bonhomme de chemin, quand, venant de l’arrière des voix connues me rattrapent. Ce sont les copains du club. Photos pour les premiers et je reprend mon ascension derrière eux. Nous nous retrouvons tous au restaurant du sommet pour la photo de groupe et surtout pour le repas en commun. Alors là, nous faisons tous une grosse entorse aux règles du savoir vivre, car la bouche pleine n’empêchant personne de parler, c’est dans un joyeux brouhaha que se déroule le repas.
Le président accroché à ses prérogatives, prend la parole pour nous annoncer que vu notre état de fraîcheur, nous allons en suivant nous ‘’taper’’ le col des Bordères. Bof ! on en a vu d’autres. Pas de rouspétance, ce ne sont pas ces trois petits kilomètres même s’ils ont des pentes à plus de 10% qui vont nous effrayer. Et on se tape le Bordères pour retomber à Estaing juste au moment où les brebis montent en transhumance. Assez pour aujourd’hui. Nous redescendons à Lourdes par Sireix et Saint–Savin, pour nous dire au revoir devant le sacro-saint ‘’Demi’’ de chez Vergé.

…. Et puis il y a eu le Tour de Corse. Certainement, une des plus belles randonnées du monde Cyclotouriste. Douze membres du Club l’ont réalisé, accompagnés de cinq épouses, et guidés dans ce périple par deux accompagnateurs de Corsica-Tour auxquels s’étaient joints sept autre cyclos.
Ce sont 1024 Kms qui furent parcourus en 10 étapes. Huit d’entre elles, longeant le bord de mer, et deux à l’intérieur des terres (Zicavo et Corte) permirent à nos Chasseurs de Cols, d’en rajouter 20 dans leur musette, les nombreuses côtes, ne sont pas comptabilisées par nos grimpeurs blasés. Bien sûr, le séjour fut agrémenté par une soirée à Porto dont le point d’orgue fut la visite en bateau de la réserve naturelle de La Scandola, inscrite au patrimoine mondial de l’UNESCO.
Douze jours de beau temps, même de très beau temps puisque la température est montée jusqu’à 42 degrés. Pas de vent, ce qui est idéal pour une randonnée de ce genre. Une très bonne ambiance a soudé ce groupe durant les douze jours.

Connaissant nos lascars et leurs épouses, nous sommes persuadés qu’ils n’avaient nul besoin de chatouilles pour partir en rigolades. Les autres membres du Club ne sont pas restés avec les pieds dans les pantoufles. Ils ont parcouru en 16 sorties, 1625 km.sur les petites routes de la région.

Enfin, ça bouge….

Le Président Sarie, avant de partir faire le Tour de Corse avec une quinzaine de C.R.L., m’a aimablement délégué une partie de ses pouvoirs pour le représenter à la conférence organisée par le S.Co.T - T.O.L. ce mercredi 13 Juin au Palais des Congrès de Lourdes.
Je développe :
S.Co. T - T.O.L. veut dire : Schéma de Cohérence Territoriale de Tarbes-Ossun-Lourdes. Il regroupe la Communauté du grand Tarbes, les Communautés de Communes du Canton d’Ossun et du Pays de Lourdes, les communes de Bazet, Bartrès, Barbazan-Débat, Boulin, Horgues et Oursbellile.
C’est un outil puissant, pour organiser et dynamiser le territoire. Réunissant tous les projets d’aménagement et de développement, il évite par la concertation des différents élus et décideurs les erreurs souvent onéreuses commises par manque d’information.
En gros, il évite les : « Ah merde ! si on avait su…. » qui nous font râler lorsque nous sommes au courant des ‘’Combien ça coûte’’ inutiles.
Ce n’est pas le but du Maillon que de développer entièrement cette conférence. Bien que les sujets clairement détaillés, émaillés de cartes et de graphiques se soient révélés très intéressants, un Cyclotouriste, homme de plein air par définition, finit à la longue par s’évader sur un petit nuage euphorique.
Mais l’intervention de M. Azot, plus pragmatique m’a ramené sur Terre, rapidement et sans parachute. De suite et sans circonvolutions inutiles, il est entré dans le vif du sujet, celui qui nous intéresse particulièrement : les Déplacements.
Il a réveillé l’attention de la salle, en préconisant un schéma de déplacement associant les agglomérations de Tarbes et Lourdes, et mes oreilles se sont allongées de dix centimètres lorsqu’il a parlé de favoriser les déplacements à bicyclette par la création de Pistes et Voies cyclables et de Circulation douce dans les agglomérations. Je me suis senti personnellement concerné quand il a dit je cite : « Dans ce contexte, il faut travailler à la réalisation d’un vrai réseau de pistes cyclables, y compris en complément de l’aménagement de la R.N. 21. »
Qu’il sache que les Cyclo-Randonneurs Lourdais se tiennent à sa disposition pour œuvrer à ce programme, mais aussi que maintenant qu’ils sont accrochés à son pan de chemise, ils ne le lâcheront pas de sitôt. J’en profite pour le remercier de sa disponibilité et de son amical accueil. Nous attendons avec impatience, le Bic entre les dents, que les travaux d’étude sur la Circulation Douce entrepris dans notre ville depuis 2004, sortent de leur carton. Que peaufinés par la D.D.E. et les techniciens municipaux, ils se concrétisent sur le terrain.

(René Delhom, le 22 juin 2007)

Photos René Delhom - Mis en ligne jeudi 4 juillet 2007 -20h30