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Restitution de la « chaise fauchée à la BNP de Tarbes » au directeur des finances publiques

samedi 30 janvier 2016 par Rédaction

L’association ATTAC 65 a restitué jeudi la chaise « subtilisée » à la BNP de Tarbes en décembre. Les membres de l’association, rejoints par plusieurs agents des impôts syndiqués à la CGT et à Solidaires, ont confié la chaise à Jean-Claude Urbain, directeur de la logistique à la Direction Départementale des Finances Publiques. L’occasion pour eux de lancer un appel à la mobilisation citoyenne contre l’évasion fiscale, pour financer la lutte contre le réchauffement climatique.

Une modeste chaise noire, recouverte de billets de banques, et environnée par une haie de chaises rouges et noires, au pied d’un grand bâtiment aux panneaux de verre. Les militants de l’Association pour une Taxation des Transactions Financières pour l’Aide aux Citoyens (ATTAC 65) ont l’art de la mise en scène symbolique. Ce jeudi matin, ils ont donné rendez-vous à Jean-Claude Urbain, directeur de la logistique à la Direction Départementale des Finances Publiques (DDFP). Objectif : lui restituer la chaise qu’ils ont « fauchée » à l’agence de la BNP de la place Verdun à Tarbes en décembre. Pour cette opération, ils ont été rejoints par des agents des impôts syndiqués à la CGT et à Solidaires. L’ambiance est détendue, le ton est à l’humour noir.

« C’est un honneur que nous vous faisons, en venant vous restituer cette chaise ‘subtilisée’ à la BNP Paribas de Tarbes. Nous espérons qu’elle sera la première étape du retour en France des 80 milliards d’euros détenus par cette banque dans les paradis fiscaux », explique Michel Sanciaud, président d’ATTAC 65. « Notre action s’inscrit dans le cadre de la campagne nationale et internationale menée par ATTAC. Elle a pour but de rechercher, auprès des grandes entreprises qui pratiquent l’évasion fiscale, l’argent nécessaire au financement de la lutte contre le réchauffement climatique ». Un autre militant d’ATTAC présente à Monsieur Urbain le « Livre noir des banques ». Il lui transmet la « lettre ouverte d’ATTAC », qui lance un appel à la mobilisation citoyenne pour la « réquisition des chaises ». « Nous avons ciblé la BNP, car cette banque détient le record du nombre de succursales dans les paradis fiscaux : 7 au total », ajoute Michel Sanciaud. « Quand la direction nationale d’ATTAC a rencontré la direction de la BNP Paribas, cette dernière a demandé que nous cessions notre action au nom de l’état d’urgence. Nous avons refusé, car la lutte contre le dérèglement climatique ne peut plus attendre. L’argent qui dort dans les paradis fiscaux appartient aux citoyens ».

Avec une urbanité conforme à son patronyme, le directeur de la logistique de la DDFP accepte la chaise en souriant. Il précise qu’il va lui-même la restituer à la BNP, déjà informée de cette démarche. Le dialogue s’engage ensuite avec les militants d’ATTAC, de la CGT et de Solidaires, sur un ton plus vif. « Pour répondre à la puissance des entreprises qui pratiquent l’évasion fiscale, nous avons mis en place une nouvelle méthode de travail », détaille Jean-Claude Urbain. « Nous avons institué des brigades spécialisées dans les départements, les régions et à l’échelle nationale. Nous coopérons aussi avec les autres Etats. Nous utilisons des logiciels pour effectuer les recherches comptables. Des objectifs sont fixés chaque année et remontés à Bercy. Nous gardons le secret dans les Hautes-Pyrénées et dans la région sur les résultats de nos investigations, car nos antagonistes ont beaucoup d’avocats et de conseillers juridiques pour se défendre. Au moindre faux pas, nos actions seraient remises en cause ». Monsieur Urbain précise que la brigade de contrôle fiscal des Hautes-Pyrénées compte sept agents. Au niveau national, environ 10 milliards d’euros sont récupérés chaque année, sur 70 à 80 milliards d’évasion fiscale générale.

« Compte tenu de l’enjeu, et des moyens dont disposent les adversaires de l’Etat, pourquoi avez-vous supprimé 3100 postes dans la chaîne de contrôle fiscal ? Alors que les grandes entreprises ont augmenté de 30% le nombre de leurs conseillers, la Direction Nationale des Finances Publiques affaiblit constamment ses effectifs. Nous avons déjà perdu un poste de contrôleur fiscal dans les Hautes-Pyrénées cette année. En réalité, nous n’avons plus les moyens d’accomplir correctement notre mission », plaide José Navarro, responsable de la CGT des Impôts. « Je déplore la mauvaise volonté des politiques au niveau national dans cette lutte à grande échelle contre l’évasion fiscale et l’optimisation fiscale. Pour quelle raison la technique du « reporting » n’a-t-elle pas été acceptée par la France ? », ajoute Jean Saint-Guirons, militant d’ATTAC et agent des impôts retraité.

« La décision de supprimer des postes dans notre administration a été prise pour renforcer les effectifs dans les ministères considérés comme prioritaires dans le contexte de l’état d’urgence : la défense nationale, la police et la justice », répond Jean-Claude Urbain. Un argument qui ne satisfait pas ses interlocuteurs des impôts. Ils pointent un paradoxe : le rôle de la Direction des Finances Publiques est précisément de donner à l’Etat un budget à la hauteur de ses priorités d’actions, en combattant l’évasion fiscale. « Nous donnons chaque année 20 milliards d’euros au titre du pacte de responsabilité à ces grandes entreprises qui ne paient pas leurs impôts », accuse José Navarro. « L’administration fiscale française est celle qui a le plus diminué ses effectifs dans la fonction publique : plus de 30 000 suppressions d’emploi sur 150 000 emplois », rappelle Jean Saint-Guirons. « La fraude fiscale est illégale, l’optimisation fiscale est légale, mais a tout d’immoral », ajoute Pascale Semmartin, secrétaire du syndicat Solidaires section Impôts.

Les militants d’ATTAC déplorent de leur côté la réaction des pouvoirs publics à leur campagne de sensibilisation. « A la suite de notre action à la BNP de Tarbes, nous avons été convoqués au commissariat, qui avait reçu une plainte pour vol émanant de la banque, et nous avons subi un prélèvement d’ADN », confie Michel Sanciaud. « A ce jour, nous ne savons pas quelle suite le Procureur de la République compte donner à cette plainte ». Cela n’a pas entamé la détermination et l’enthousiasme des militants de l’association, qui espèrent susciter un large mouvement citoyen pour accentuer la lutte contre l’évasion fiscale. « L’avenir de notre planète en dépend ! ».

Jean-François Courtille

Contact : http://local.attac.org/attac65/